Une mère et sa fille égorgées en Isère : le mari et père mis en examen, 28 ans après

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Publié le 16/06/2021 19:03:46

Trahi par des tâches de sperme sur un pantalon, Marian Marinescu, 72 ans, a été mis en examen pour les assassinats de sa femme Michèle et de leur fille Christine, tuées sauvagement en 1993 à Sassenage (Isère).

C’est un incroyable rebondissement dans un cold case vieux de 28 ans. Un homme vient d’être mis en examen pour l’assassinat, en janvier 1993 à Sassenage (Isère), d’une femme et de la fille de cette dernière, âgée de 13 ans, « précédé ou accompagné du viol » de l’adolescente. Et cet homme, aujourd’hui âgé de 72 ans, n’est pas n’importe qui, puisqu’il s’agit du mari et père des deux victimes.

Le 7 janvier 1993, les corps sans vie de Michèle Marinescu, 43 ans, et de sa fille Christine, 13 ans, sont retrouvés dans leur maison de Sassenage, dans la banlieue de Grenoble. Un double meurtre sauvage. Les victimes ont été égorgées à l’aide d’un couteau. « Une véritable boucherie », confiera un enquêteur. Malgré toutes les investigations des gendarmes de la Section de recherches (SR) de Grenoble, l’enquête va piétiner pendant presque trois décennies. Rien n’a été volé dans la maison, mais la piste d’un cambriolage qui a mal tourné est étudiée. On évoque aussi un possible crime de rôdeur. Puis, l’éventuelle vengeance d’une femme de ménage qui avait été renvoyée par Michèle Marinescu. Mais ces pistes ne donneront rien.

Danièle Castro, la sœur de Michèle Marinescu et tante de Christine, remue ciel et terre pour que le dossier ne tombe pas dans les oubliettes. Grâce à elle, l’affaire est évoquée en 1995 dans la célèbre émission de Jacques Pradel « Témoin N° 1 ». Avec comme objectif de tenter de recueillir de nouveaux témoignages. En vain. Marian Marinescu, mari et père des victimes semble, lui, au-dessus de tous soupçons. Il faut dire que cet ingénieur de 45 ans, dirigeant d’une société d’informatique, a un alibi en béton : au moment des faits, avec son fils Julien, 7 ans, il affirmait se trouver en Roumanie, son pays d’origine, pour passer les fêtes de fin d’année dans sa famille.

Les progrès de l’ADN

Cinq juges vont se succéder dans ce dossier. En janvier 2000, le juge Luc Fontaine tente de relancer l’affaire en lançant « un ultime appel à témoins », sept ans après les faits. « C’est l’appel de la dernière chance pour qu’un crime aussi horrible ne reste pas impuni. Les assassins ont agi avec une violence inouïe. C’est un crime barbare », insiste alors le magistrat. Mais l’affaire continue de rester un mystère.

Fin 2018, un enquêteur de l’Institut de recherches criminelles de la gendarmerie nationale (IRCGN) basé à Pontoise, et un analyste criminel du groupement de gendarmerie de l’Isère, se lancent dans une relecture complète du dossier. Ils proposent de nouvelles pistes aux magistrats instructeurs et leur demandent de procéder à de nouvelles expertises, en s’appuyant sur les progrès de la science en matière d’analyses ADN. « L’enquête a connu un rebondissement majeur en ce tout début d’année 2021 à la suite des résultats fournis par le laboratoire d’analyses génétiques de l’IRCGN qui ont mis en évidence de nombreuses traces de sperme de Marian Marinescu sur le pantalon de sa fille Christine », explique Éric Vaillant, le procureur de la république de Grenoble, pour qui « ces données sont sans équivoque ».

L’emploi du temps du suspect, appelé par les spécialistes de la gendarmerie « une ligne de temps », est alors réétudié en détail. Et l’alibi en béton de Marian Marinescu est alors totalement remis en cause. Il a très bien pu, dans un premier temps, se rendre en Roumanie avec son fils Julien, revenir en Isère pour tuer sa femme et sa fille. Puis, repartir vers la Roumanie.

Comment expliquer ce geste ?

Ce lundi 14 juin, Marian Marinescu a été interpellé en Isère, où il résidait toujours et placé en garde à vue. « Devant les enquêteurs de la gendarmerie, et face aux éléments à charge présentés, il a indiqué qu’en supposant que ce soit lui, il n’avait aucun souvenir d’avoir commis les faits. Devant les deux juges d’instruction en charge du dossier, il a souhaité garder le silence », précise le procureur.

L’homme, âgé aujourd’hui de 72 ans, a été mis en examen pour « assassinats », « précédé ou accompagné du viol de sa fille » et incarcéré. Comment expliquer un double meurtre aussi sauvage de la part d’un mari et d’un père ? Le procureur reste vague pour l’instant sur le mobile de ces crimes : « Il y a des éléments dans le dossier. Il y avait des tensions dans le couple. Ils avaient, à un moment donné, parlé de divorce. Cela tourne autour de ça », confie Éric Vaillant. Mais pourquoi aller jusqu’à « l’innommable » en violant sa fille avant de la tuer ? Cette question reste sans réponse.

Contactée, Danièle Castro, sœur et tante des victimes, a juste lâché quelques mots : « C’est le pire. C’est trop épouvantable. » Pour son avocat, Me Hervé Gerbi, « l’enquête a débouché sur la pire des hypothèses pour cette famille qui pendant 28 années a cherché la vérité ». Une famille qui a entouré de son affection le jeune Julien qui, en 1993 a perdu sa mère et sa sœur dans des circonstances terribles. « Et dans ce cadre, Danièle Castro, sa tante, a continué d’entretenir des relations avec son ex-beau frère », a précisé l’avocat. Il faut noter que Marian Marinescu s’était peu impliqué dans les appels à témoins lancés pendant ces 28 ans pour aider à identifier le ou les meurtriers de sa femme et de sa fille.

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Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/une-mere-et-sa-fille-egorgees-en-isere-le-mari-et-pere-mis-en-examen-28-ans-apres-16-06-2021-4B3C7XKFXNAIJE3IHIV6RVN44Y.php