

Publié le 04/04/2023 13:42:05
En quatorze ans, Jonathan a réalisé des centaines de dons de sperme et engendré des centaines d’enfants. Une plainte réclame à la justice des Pays-Bas de l’empêcher de donner naissance à de nouveaux enfants.
Maaike (les prénoms ont été changés par la presse néerlandaise) a abandonné depuis un moment l’idée d’avoir un enfant en couple. Cette Néerlandaise âgée d’une trentaine d’années a longtemps espéré qu’une vie de couple classique l’attendait mais « l’horloge biologique » commence à faire son œuvre. C’est décidé, elle aura un bébé toute seule. Maaike se tourne alors vers un site néerlandais qui met en contact de futures mères célibataires et des donneurs de sperme.
Là, la trentenaire, originaire de la Drenthe, dans le nord-est du pays, va de déconvenues en déconvenues, relate le média Volkskrant. L’un lui offre ses gamètes, mais à condition de lui inséminer de manière naturelle, un autre l’invite à une étrange réunion dans une forêt… Alors lorsque Maaike tombe sur Jonathan, sa chance semble lui être revenue. Ce blond « éloquent, intelligent », originaire de La Haye, qui dit « être devenu donneur de sperme après avoir constaté l’impact de l’infertilité sur un couple d’amis » semble idéal. Jonathan veut « aider des femmes comme Maaike à réaliser leur souhait le plus cher ». Il assure en outre que ses dons de sperme n’ont engendré que six enfants. Il est le candidat idéal.
Une coïncidence trop énorme
Ce que ne sait pas encore Maaike, c’est que Jonathan n’est pas le géniteur d’une petite fratrie, mais de plus de 550 enfants aux Pays-Bas et à l’étranger. Bien au-delà du maximum légal imposé aux donneurs de sperme. La Fondation Donorkind, qui protège les droits des petits néerlandais issus de dons de gamètes, vient de déposer plainte contre lui. Elle réclame qu’il soit interdit à Jonathan, âgé de 41 ans aujourd’hui, de continuer les dons, et que son sperme stocké dans plus de 13 cliniques soit détruit.
Aux Pays-Bas, le don de sperme est réglementé. Le sperme d’un homme ne peut être utilisé pour procréer que 25 enfants (et un maximum de 12 familles, qui peuvent avoir plusieurs enfants d’un même donneur). Certaines femmes préfèrent éviter les cliniques, leurs listes d’attente, examens psychologiques et autres contraintes, en s’inséminant elle-même avec le sperme de donneurs.
C’est ce que décide de faire Maaike quelques semaines après sa rencontre avec Jonathan. Le donneur voyage jusque chez elle. Quelques mois plus tard, à l’automne 2017, Maaike donne naissance à une petite fille.
Un an plus tard, la trentenaire dîne avec un couple de lesbiennes. Elles aussi ont donné naissance à un enfant grâce à un don de sperme, elles aussi grâce à un certain Jonathan originaire de La Haye. Le couple connaît une autre femme qui également eu recours à ce donneur… La coïncidence est trop énorme. Toutes se mettent à tirer le fil.
Un « serial donneur »
Et mettent au jour l’ampleur de l’œuvre du « serial donneur ». En plus de 14 ans de dons, Jonathan a fourni plus de 13 cliniques des Pays-Bas, ainsi que la banque de sperme danoise Cryos, qui fournit le monde entier. D’autres banques européennes pourraient également avoir été « ravitaillées ». Le quadragénaire aurait engendré au moins 550 enfants… La Fondation Dornokind n’en recense officiellement que 102 dans son pays mais selon l’une de ses bénévoles citée par Volkskrant, il pourrait avoir jusqu’à 800 enfants dans en Europe et même jusqu’aux États-Unis ou au Mexique.
« Maintenant qu’il a indiqué dans diverses conversations avec les mères qu’il ne voulait pas arrêter son comportement et qu’il a récemment approché de nouveaux parents potentiels, une interdiction de nouveaux dons est exigée sous peine de sanction, écrit la Fondation dans un communiqué. Il est également exigé qu’il n’approche pas de nouveaux parents potentiels et que les cliniques détruisent ses stocks. »
Un tribunal de La Haye devait examiner cette plainte lundi dernier mais le « serial donneur » était en « vacances à l’étranger ». Elle a été renvoyée à la mi-avril.
« Malheureusement, cet homme ne tient aucunement compte des droits des enfants nés de dons de sperme, estime Ties van der Meer, président de la Fondation Donorkind. C’est pourquoi nous, en tant que fondation, devons défendre les intérêts des enfants de donneurs qui ne peuvent pas le faire eux-mêmes. » Selon leur avocat, Mark De Hek, le comportement de Jonathan « est dangereux pour la santé psychosociale de sa progéniture. (…) Cela peut entraîner des problèmes émotionnels tels que l’impuissance, la frustration, la jalousie et la peur de l’inceste. »
Tandis que certains évoquent un « complexe de Dieu tout-puissant », Jonathan, interrogé par Volkskrant sur son « addiction » au don de sperme, assure vouloir rendre service : « C’est bien de pouvoir signifier quelque chose pour les autres. Je sentais que j’avais déjà accompli beaucoup de choses dans ma vie et je sentais que je voulais faire quelque chose qui n’était pas nécessairement pour moi. J’ai aussi pensé que ce serait formidable si les enfants et les parents pouvaient éventuellement entrer en contact les uns avec les autres, comme dans une grande famille. »
Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/un-serial-donneur-neerlandais-accuse-davoir-engendre-des-centaines-denfants-a-travers-le-monde-04-04-2023-YPZJT7YJ65HSNJWUUTJEOFW3KE.php