Un homme condamné à 20 ans de réclusion pour le meurtre du petit ami de sa fille

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Publié le 22/09/2022 17:03:03

Un restaurateur franco-kurde a été condamné par la cour d’assises de l’Oise à 20 ans de réclusion criminelle, ce jeudi 22 septembre, pour avoir tué le petit ami de sa fille à coups de couteau en 2014.

Un restaurateur franco-kurde a été condamné par la cour d’assises de l’Oise à 20 ans de réclusion criminelle, ce jeudi 22 septembre 2022, pour avoir tué le petit ami de sa fille à coups de couteau en 2014, après avoir surpris le couple nu au domicile familial. La cour d’assises de l’Oise n’a pas suivi l’avocat général, Michel Mazars, qui avait requis 30 ans pour un acte « barbare » qui « questionne la promesse républicaine ».

« Ce 24 juillet 2014, Muhittin Ulug s’est comporté comme un barbare », avait lancé Michel Mazars, face à un accusé tête basse, sanglotant dans le box, pour la première fois depuis l’ouverture du procès lundi 19 septembre. À 52 ans, il comparaissait pour avoir tué Julien Videlaine, 20 ans, dans un « véritable déchaînement de violence », le frappant de « 19 coups de couteau », même « lorsqu’il était à terre », pour « la simple raison […] qu’il venait sans doute d’avoir des relations sexuelles avec sa fille », avait résumé l’avocat général.

Même le directeur d’enquête de la police judiciaire « n’avait jamais été confronté à une telle scène », et « ne savait pas que le corps humain pouvait renfermer autant de sang ». « Ce dossier brasse de vrais enjeux de société », qui ont « trait à la place des femmes, la question du vivre ensemble […] C’est la promesse républicaine que ça questionne », avait déclaré Michel Mazars aux jurés.

L’accusé, lui, assurait depuis son arrestation qu’il avait cru protéger sa fille d’un agresseur. « J’ai perdu l’esprit », croyant ma fille « en danger », a-t-il encore répété mercredi, racontant être rentré plus tôt, dans leur pavillon de Nogent-sur-Oise, car la jeune femme de 19 ans ne répondait pas au téléphone. Trouvant les portes fermées et une fenêtre ouverte, il aurait « paniqué ».

Mais à son entrée, « il prend la précaution de se déchausser », « de s’armer d’un couteau ». Il « entend des voix, une discussion normale. Pas de scène de désordre, pas de traces d’effraction, pas d’appel aux secours », réplique Michel Mazars. « Lorsqu’il voit sa fille, elle n’est pas agressée » et Julien Videlaine « est nu, désarmé ».

La vérité, « elle est dans la parole de sa fille » après le drame, tranche-t-il. Blessée à la main, cette dernière jure alors aux policiers avoir tenté de s’interposer entre son père et Julien, qu’elle aimait et voyait contre la volonté de ses parents.

Elle évoque alors le traditionalisme de son père, qui interdisait à ses filles toute relation amoureuse, et l’avait menacée de mort si elle désobéissait. Placée sous protection policière, elle a un temps vécu en foyer. À la barre, elle s’est accablée mercredi, affirmant, en larmes, être la « seule responsable » pour n’avoir « pas fait les choses dans les règles » de sa famille. « Tu n’es pas coupable », lui a répondu Anaïs, la sœur de Julien.

Muhittin Ulug s’est comporté « comme un lâche » en fuyant en Turquie, dont il ne sera extradé qu’en 2019 après un long combat de la famille Videlaine, assène encore l’avocat général. Au moment du drame, lui et son épouse « savent » que leur aînée est, selon leur conception, « en train de sortir du droit chemin ». Il s’en prend alors à celui « qui vient matérialiser » cette perte de contrôle.

« C’est l’acte d’un homme qui est devenu fou » en voyant sa fille « nue avec un inconnu », qui a voulu « effacer cette scène », a plaidé en défense l’avocat Frank Berton. « On est le produit de sa culture », tente-t-il d’expliquer. Dans la conception de l’accusé, « on respecte la femme à partir du moment où elle respecte les traditions ». « Il est fruste. “Une capacité intellectuelle limitée” », insiste-t-il encore. « On parle de “crime d’honneur”, mais il n’y a pas d’honneur à tuer un homme. » Dans le box, l’accusé acquiesce, en larmes.

« Les Kurdes n’ont pas armé Muhittin Ulug. Heureusement les cultures évoluent », et la vision qu’a l’accusé de « traditions ancestrales qui n’ont plus lieu d’être » n’est « pas celle des Kurdes », mais un « dévoiement », tranche l’avocat général.

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Source : https://www.ouest-france.fr/societe/justice/un-homme-condamne-a-20-ans-de-reclusion-pour-le-meurtre-du-petit-ami-de-sa-fille-0198783a-3a80-11ed-9b76-9edc71c5adb1