Seine-et-Marne : vingt ans après sa disparition, la dernière marche en mémoire d’Estelle Mouzin

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Publié le 07/01/2023 18:34:25

Alors que le procès de Monique Olivier se profile, mettant fin aux recherches pour retrouver le corps d’Estelle Mouzin, enlevée le 9 janvier 2003 par Michel Fourniret, les proches de la fillette se sont réunis une ultime fois en sa mémoire à Guermantes ce samedi.

Il a fallu une fois de plus beaucoup de forces à Éric Mouzin. Le papa de la petite Estelle, disparue le 9 janvier 2003 à Guermantes (Seine-et-Marne), est revenu ce samedi sur les lieux de l’enlèvement de sa fille de 9 ans par Michel Fourniret, pour une vingtième et dernière marche anniversaire.

« Je viens à reculons. Ça fait bizarre de se dire que c’est la dernière fois qu’on marche pour Estelle. J’y ai trouvé à chaque fois une source d’énergie et de réconfort », a-t-il confié lors de l’assemblée générale de l’association Estelle, créée pour continuer à chercher la fillette dont le terrible destin n’a été élucidé qu’en 2020 avec la découverte de son ADN sur un matelas trouvé chez Fourniret.

Cet ultime rendez-vous clôt aussi l’espoir de retrouver la fillette au timide sourire, son corps y compris, malgré la dizaine de fouilles entreprises avec même le renfort de l’unité spécialisée du 17e régiment du génie parachutiste et la persévérance de la juge Sabine Khéris. « Elle est quelque part dans une forêt des Ardennes. La justice a tout fait pour tenter de la localiser. On sait ce qui lui est arrivé mais il est acté qu’on ne la retrouvera pas, faute d’informations pertinentes des accusés. Mais je ne sais pas si ça change quelque chose. En tout cas, je n’ai pas de prise sur ça », tente de s’apaiser Éric Mouzin.

La fillette officiellement déclarée morte

Michel Fourniret, condamné à la perpétuité incompressible en 2008 pour les meurtres de sept jeunes femmes ou adolescentes entre 1987 et 2001, est mort il y a un an et demi avec ses informations, tout en reconnaissant à demi-mot en mars 2020 la séquestration, le meurtre et peut-être le viol d’Estelle. Le dossier d’instruction concernant l’implication de sa complice Monique Olivier, un peu plus bavarde, va être bientôt achevé, menant à un procès en novembre prochain (elle est également poursuivie pour complicité dans les meurtres de Marie-Angèle Domece et Joanna Parrish, avoués par Fourniret en 2018).

En conséquence, Estelle a été déclarée morte le 10 janvier 2003. « Le certificat a été établi le 14 juin dernier, le livret de famille a été modifié, explique Éric Mouzin la voix tremblante. Oui, c’est assez brutal. » À titre personnel, il va poursuivre l’État pour dysfonctionnement de la justice, la piste de Fourniret ayant été délaissée, et saisir la Cour Européenne des droits de l’Homme pour violation du droit à la vie.

Une vingtième et dernière fois, Éric Mouzin et ses enfants, les frères et sœurs d’Estelle, accompagnés de membres de l’association et d’une cinquantaine de riverains se sont retrouvés devant la boulangerie. Là où la fillette a été aperçue pour la dernière fois avant de tomber dans les griffes de Fourniret, déjà venu en repérage quelques semaines plus tôt. « Estelle est avec nous pour toujours. Et son père a permis beaucoup d’améliorations dans la recherche d’enfants, insistent Florence et Patricia. Et on se rappellera toute notre vie de ce mois de janvier glacial. On a participé aux recherches, nos enfants se connaissaient. Pendant des années, il n’y a plus eu d’enfants jouant dans la rue ».

« Face à la noirceur de ces criminels, nous opposons des valeurs humanistes »

Silencieusement, le cortège a rejoint le cerisier du Japon planté en 2005 en mémoire d’Estelle, qui au printemps déploie ses pétales roses dans un bel hommage à la vie qui gagne. Car c’est de ce côté qu’Éric Mouzin veut pencher malgré toutes ces années à tenter de comprendre l’impensable. « C’est vertigineux de penser qu’Estelle a disparu en 15 secondes et que nous avons passé 20 ans à résoudre ce qu’il a pu se passer pendant ces petites secondes, confie-t-il. C’est terrible quand on rencontre ces deux individus qui s’attaquent aux plus faibles, de leur parler et de constater qu’ils ne sont pas dans ce monde, qu’ils ne regrettent rien et qu’au contraire, ils tirent satisfaction d’être maître du jeu. Mais avec l’association, nous travaillons dans la joie à améliorer la société. Face à la noirceur de ces criminels, nous opposons des valeurs humanistes. »

Leur combat a permis la mise en place de l’alerte enlèvement en 2006 et la création l’an dernier d’un pôle spécialisé dans les affaires non élucidées à Nanterre (Hauts-de-Seine). « Il faudrait aussi que l’affichage d’enfants disparu s ne soit plus un bricolage fait par les familles et qu’enfin un fichier soit mis en place », relance Éric Mouzin qui continuera à œuvrer avec l’association, notamment pour aider les magistrats du Pole Cold Cases.

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Source : https://www.leparisien.fr/seine-et-marne-77/seine-et-marne-20-ans-apres-sa-disparition-la-derniere-marche-en-memoire-destelle-mouzin-07-01-2023-B6AB6NYECZGLPFWOFYZXGKJOSY.php