REPORTAGE. À Lourdes, l’Église de France prie et se repent des crimes pédophiles

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Publié le 06/11/2021 19:22:15

Les 130 laïcs invités se sont joints aux évêques, samedi 6 novembre, à Lourdes, pour un temps mémoriel et de repentance. En mémoire des victimes de violences sexuelles.

Un visage d’enfant en larmes sculpté dans la pierre. « Dans ses yeux, se mêlent la souffrance de la violence subie, le déni de sa parole et une grande solitude », décrit, émue, Véronique Garnier. Victime enfant d’un prêtre pédophile, elle participe depuis mardi à l’assemblée de la Conférence des évêques de France (CEF). Revenir à Lourdes où elle « a subi ces abus » et s’exprimer devant les quelque 300 personnes, dont des prêtres, religieux et laïcs, silencieux et bouleversés, regroupés devant cette image lui a demandé du courage. Elle, dont « la foi a été abîmée », le confie : « Jusqu’à la dernière nuit, j’ai hésité. J’ai trouvé la force, pour toutes les victimes, vivantes, et celles qui sont mortes. »

La photographie a été dévoilée samedi 6 novembre devant l’hémicycle au sein duquel les évêques examinent jusqu’à lundi les quarante-cinq recommandations de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase). Face à la grotte et à la basilique du Rosaire, cette image « restera », indique le père Hughes de Woillemont, porte-parole des évêques. Elle préfigure le « lieu mémoriel » qui sera bâti ici même.

En silence, le groupe est ensuite passé sur l’autre rive du Gave de Pau pour aller faire acte de repentance, genoux à terre sur l’asphalte, au pied de la basilique. Et pour « implorer le pardon de Dieu ». Les cloches ont sonné le glas, « qu’on sonne pour les obsèques », souligne Mgr François Touvet, évêque de Châlons-en-Champagne. « J’ai senti derrière mes épaules la foule des victimes. Comme si elles étaient là, ces 330 000 personnes que nous a fait découvrir le rapport Sauvé. »

Jean-Marie Delbos, 75 ans, victime d’abus entre 10 et 15 ans, n’a pas été convié à l’assemblée. Il s’est quand même glissé dans la foule brandissant une pancarte sur laquelle il a écrit « victime » en grosses lettres. Il dénonce un « simulacre. I l faut qu’ils affirment que les prédateurs seront punis et exclus de l’Église. Le mien a fait toute sa carrière sans jamais être inquiété. »

« Il ne faut pas se cacher derrière la prière », affirme Dominique Quinio, présidente de Semaines sociales de France et membre du réseau Promesses d’Église, très représenté dans l’assemblée de laïcs invités pour réfléchir aux réformes à engager.

« La reconnaissance de la responsabilité de l’Église » par les évêques, vendredi, « n’est pas le tout mais ce temps mémoriel et de pénitence n’avait de sens qu’une fois cette étape franchie. On sent les évêques effarés par l’ampleur des réformes à mener. On attend une méthode, un calendrier. »

Près d’elle, Dominique Rouyer, secrétaire nationale du CCFD Terre solidaire, mesure le « chemin » parcouru. « On est arrivés en colère. On a réussi à se parler, avec les évêques. On repart avec la conviction que nous ne devons nous y mettre ensemble. » Des décisions sont attendues ce lundi 8 novembre.

Crédits image et texte : Ouest France©
Source : https://www.ouest-france.fr/faits-divers/pedophilie/reportage-a-lourdes-l-eglise-de-france-prie-et-se-repend-des-crimes-pedophiles-b9eea15c-3f2c-11ec-8777-2ab647434f61