Projet d’attentat en 2017 : à son procès, l’un des accusés dresse sa vie sous alias

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Publié le 06/01/2023 20:24:00

Deuxième jour de procès de l’attentat déjoué de 2017 devant la cour d’assises spéciale de Paris. Ce vendredi 6 janvier 2023, la cour s’est penchée sur la personnalité complexe de l’un des principaux accusés : Clément Baur.

Depuis ses 17 ans, il utilisait de fausses identités, notamment de réfugiés du Caucase. La cour d’assises spéciale de Paris a tenté vendredi 6 janvier 2023 de percer le mystère de la vie sous alias de Clément Baur, accusé d’un projet d’attentat à Marseille à l’aube de la présidentielle de 2017.

Penché sur le micro qu’il triture nerveusement, Clément Baur, survêtement noir à bandes blanches, semble soupeser chacun des mots qu’il livrera à ses juges.

L’accusé de 29 ans comparaît près de six ans après avoir été interpellé à Marseille, soupçonné avec son comparse Mahiedine Merabet d’une attaque terroriste « imminente », dont l’enquête n’a pu déterminer la cible exacte.

La cour ne se penchera sur les faits que dans un second temps. Au deuxième jour du procès de ce duo jihadiste, il n’est question que de la personnalité de Clément Baur, que le juge d’instruction avait qualifié d’« atypique ».

Au gré des interrogations sur l’enfance de ce fils unique, la séparation « traumatisante » de ses parents quand il a 8 ans, sa scolarité médiocre, sa conversion « vers 14 ans » à l’islam, la cour cherche à comprendre ce qui a pu le pousser à délaisser sa véritable identité pour vivre en clandestinité.

Et en premier lieu le choix de ce départ en Belgique à 17 ans.

Clément Baur raconte avoir répondu à « l’invitation d’un pote » et être parti sans grand projet, même s’il parle à ses parents d’« une formation ».

Il acquiert une première fausse carte d’identité, « française » précise l’accusé, avant d’esquiver toute question sur le pourquoi et le comment. Pour « des projets, des trucs, faire des faux crédits », finit-il par lâcher.

Sous le nom d’un réfugié du Daghestan, Ismaïl D., il dépose une première demande d’asile. Il fera de même quelques années plus tard en France et en Allemagne.

Dans le box, Clément Baur assure avoir berné les autorités belges sans alors parler le russe – il l’a appris de manière autodidacte – et dans un but purement utilitaire : « Toucher les aides sociales belges » de « 750 € par mois ».

Durant ses années belges, il n’a fait « franchement pas grand-chose », évacue-t-il aussi.

C’est cette même fausse identité d’Ismaïl D. qu’il présentera plus de quatre ans plus tard lors de sa première confrontation avec la justice française, pour usage et détention de faux documents administratifs.

Le 16 janvier 2015, Clément Baur est contrôlé à bord d’un train entre la Belgique et la France. Des « deux ou trois fausses cartes » qu’il dit détenir, il « montre des papiers lituaniens », retrace l’accusé.

Arrêté pour ces faux papiers, il dit s’appeler Ismaïl D., être parti de Russie après avoir été « enlevé et torturé », évoque un « frère mort à 19 ans », une sœur vivant en Turquie, un rendez-vous à la préfecture prévu prochainement pour son titre de séjour en France, retrace la présidente.

Une légende qu’il n’abandonnera pas en comparution immédiate, à l’issue de laquelle il est condamné à quatre mois d’emprisonnement et incarcéré.

Mais qu’a-t-il fait de si « répréhensible en Belgique » pour ne pas présenter sa vraie carte d’identité et n’avoir même pas eu à son procès la « tentation de dire “je suis Français” », le presse la présidente Corinne Goetzmann.

Clément Baur livre des explications confuses et plus la magistrate insiste, plus elles apparaissent alambiquées.

« C’est mieux de prendre quatre mois que d’avoir une fiche S [de radicalisation] et un casier », avance l’accusé.

Il évoque de lui-même le fait que son arrestation intervenait au lendemain du coup de filet contre la cellule terroriste de Verviers, et son « ticket de train » montrait qu’il venait de cette commune belge où il vivait.

Il laisse entendre que les policiers le soupçonnaient d’avoir un lien avec ces jihadistes, des soupçons infondés selon lui.

En prison, Clément Baur partagera quelques semaines, sous l’alias d’Ismaïl D., la cellule de Mahiedine Merabet.

Ce dernier affirmera au cours de la procédure qu’il était persuadé que son codétenu était un réfugié du Caucase, tout comme deux ex-concubines de Clément Baur, des Tchétchènes épousées religieusement.

Verdict attendu le 3 février.

Crédits image et texte : Ouest France©
Source : https://www.ouest-france.fr/societe/justice/projet-d-attentat-en-2017-a-son-proces-l-un-des-accuses-dresse-sa-vie-sous-alias-1f17642a-8df5-11ed-8453-f833f2a73d4e