Procès du drame de Millas : sous pression, la conductrice du car scolaire s’effondre, l’audience reportée

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Publié le 22/09/2022 16:22:38

Sous pression depuis le début de ce procès, qui tente de faire la lumière sur ce funeste jour de 2017 où le car scolaire qu’elle conduisait a été percuté par un train à un passage à niveau, causant la mort de six collégiens, la conductrice s’est effondrée, provoquant un report de l’audience.

Effondrée et en larmes après des questions des avocats des parties civiles, Nadine O., la conductrice du bus scolaire de Millas, a craqué ce jeudi 22 septembre à la barre du tribunal correctionnel de Marseille, après un peu plus d’une heure d’audience. Sa prise en charge par les marins-pompiers après une crise de sanglots en plein témoignage a conduit la présidente du tribunal Céline Ballerini à suspendre d’abord l’audience, puis à renvoyer la suite de son interrogatoire, devenu impossible, à lundi matin.

Ce dernier était consacré aux expertises médicales menées sur Nadine O. durant l’instruction pour « homicides et blessures involontaires ». Pas de trouble auditif ni visuel selon les médecins, mais un « trou noir » a martelé la conductrice du bus scolaire de Millas percuté par un train le 14 décembre 2017 pour un terrible bilan de six collégiens décédés et dix-sept autres blessés.

Malgré de nombreux témoignages qui affirment l’inverse depuis lundi et interrogée par les avocats des familles de victimes, elle maintient que la barrière du passage à niveau était levée quand elle a engagé son bus avant le drame, son dernier souvenir.

« Si je vous dis que la barrière était ouverte, elle était ouverte ! »

« Je n’ai pas entendu le klaxon du train », soutient dans un flot de larmes et de hoquets la conductrice, cintrée dans sa veste noire, les mains croisées sur le pupitre. « Une fois que j’ai passé mon car, je m’apprête à me relancer et je me réveille par terre. C’est là que j’ai eu un trou noir. Je ne me vois pas déposer les enfants et je comprends qu’il y a un problème. J’ouvre les yeux, j’entends plein de cris, je ne vois pas grand-chose. J’ai l’impression de voir la scène d’en haut, j’entends des hélicoptères… Je me demande pourquoi je vois les sièges. » Son audition du jour s’arrêtera là.

Mercredi, alors que plusieurs avocats des parties civiles la poussaient dans ses retranchements après les expertises techniques montrant qu’elle n’avait pas respecté un stop à la sortie du collège et qu’elle conduisait à une allure soutenue, elle avait finalement reconnu ne pas avoir « respecté forcément le stop », contrairement à ses premières affirmations. Mais, toujours en larmes, elle avait encore répété : « Si je vous dis que la barrière était ouverte, elle était ouverte ! »

Une version qui passe de plus en plus mal pour les parties civiles qui, bien que le procès soit diffusé en direct à Perpignan, ont fait le déplacement des Pyrénées-Orientales à la salle des procès hors-norme de Marseille depuis le début de la semaine.

« Elle est peut-être dans ce déni pour se protéger »

« Depuis lundi, nous avons des informations qui convergent et qui affirment qu’elle a bien franchi ce passage à niveau alors que la barrière était fermée. Elle est peut-être dans ce déni pour se protéger. Je ne suis pas à sa place, mais si je l’étais, dire la vérité serait un soulagement, dire ce qui s’est passé plutôt que se cacher derrière un trou noir qui nous laisse perplexe », estime Sylvain Sede, père d’un enfant blessé dans l’accident, qui poursuite : « Je n’ai aucune acrimonie envers la conductrice, un accident cela peut arriver à tout le monde. Mais il faudrait qu’elle assume et qu’elle dise enfin ce qui s’est passé. »

« C’est clair et net qu’elle craque mais c’est humain, , reprend Stéphan Mathieu, père d’Ophélie, décédée dans le bus. Elle a ses souvenirs qui reviennent petit à petit et ça va être de plus en plus intense. Elle est toujours dans un déni complet du fait qu’elle a commis une erreur. Pour elle, c’est un trou noir. On est perturbé par cette suspension du procès mais c’est compréhensible. On va attendre lundi pour voir si elle revient. On est déçu, on aimerait qu’elle dise ce qu’elle a fait et qu’elle s’excuse. Nous, on craque, les enfants craquent… Quoi qu’il arrive, on sait aujourd’hui qu’elle est coupable mais on a besoin de savoir la vérité sur ce qui s’est passé. Mais je n’ai pas d’espoir qu’elle la dise. »

« Impossibilité d’établir un lien entre la prise de médicaments et l’accident »

Avant son malaise, le tribunal s’était longuement attardé sur les médicaments que prenait tous les jours pour s’endormir Nadine O. depuis au moins quatre ans, du Zopiclone prescrit par son médecin ou de l’Atarax qu’elle empruntait à sa fille. Mais la présidente a souligné qu’après les expertises, il y avait une « impossibilité d’établir un lien entre la prise de médicaments et l’accident ».

La posologie du Zopiclone met en garde sur les dangers de la conduite douze heures après la prise, ce qui n’était pas le cas l’après-midi du drame. « Non, je ne me suis pas endormi, avait affirmé la prévenue. J’avais bien dormi la veille et j’avais pris mon service le matin normalement. » Ses analyses sanguines ont également montré que la conductrice n’était pas sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiant.

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Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/proces-du-drame-de-millas-sous-pression-la-conductrice-du-car-scolaire-seffondre-en-pleine-audience-22-09-2022-4YPYPR5IFBB5ZEMWAEQDGM3LAI.php