Procès du crash Rio-Paris. « Je n’ai jamais cessé d’espérer » : les proches des victimes témoignent

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Publié le 23/11/2022 19:14:26

Des proches de victimes du crash Rio-Paris de 2009 ont témoigné ce mercredi 23 novembre 2022 au tribunal correctionnel de Paris. Ils racontent leur souffrance, 13 ans après le drame.

« Sa sépulture, c’est l’Atlantique. » Des proches des victimes allemandes du crash du vol Rio-Paris en 2009 ont raconté à la barre, mercredi 23 novembre 2022, leur souffrance depuis le drame, ouvrant la semaine de témoignages des parties civiles.

Le tribunal correctionnel de Paris, devant lequel sont jugés depuis le 10 octobre Airbus et Air France, écoute jusqu’au 30 novembre les familles des 228 personnes mortes dans la catastrophe. Parmi elles se trouvaient 28 Allemands.

« Une série de frustrations et de déceptions » : prenant la parole en premier, Bernard Gans a décrit la façon dont les membres de l’association allemande HIOP ont vécu la longue instruction qui a abouti au procès.

La peine encourue, 225 000 €, « cela signifie à peu près 1 000 € par personne tuée. Cela ne peut être ressenti que comme une insulte aux victimes », a-t-il aussi voulu dire.

« Ce n’est pas le tribunal qui décide les peines, c’est le législateur », a doucement fait remarquer la présidente.

Une femme brune vêtue de noir a ensuite pris place à la barre, elle aussi accompagnée d’une interprète.

« Je pleure la mort d’Adrian qui, le 1er juin 2009, à l’âge de 41 ans, n’a pas atteint la destination qu’il voulait en prenant le vol AF447 », a débuté Victoria Hinzmann.

« Adrian était ingénieur en mécanique et se rendait souvent au Brésil pour son travail. » Ce jour-là, il avait « décidé de rentrer à la maison plus tôt que prévu » et de « me faire la surprise », a-t-elle poursuivi.

Le couple s’était rencontré à l’université. « Nous étions fiancés, nous étions tous les deux très enflammés, nous voulions nous marier, avoir un enfant. »

Adrian « était un esthète, un esprit vif, raffiné, gentil et très sensible, avec un rire quasi-magique qui était contagieux, avec un très grand nombre de talents et de multiples centres d’intérêt », a-t-elle ajouté.

Le jour de la catastrophe, « ma vie s’est brisée en millions de débris », a-t-elle résumé. « J’ai appris à refonctionner en tant qu’être social, mais je suis devenue une autre personne. »

« Sa sépulture, c’est l’Atlantique, et chaque année, le jour de son anniversaire, de sa mort, je vais au bord d’une rivière, à la mer, à l’océan, je jette des fleurs dans l’eau, je les regarde et j’imagine qu’elles l’atteignent. »

Celle qui était comédienne « n’a plus jamais joué sur scène », ne s’est « pas mariée », n’a « pas eu d’enfant ». « Mais je vis, c’est une chance qu’Adrian n’a pas eue », a-t-elle conclu.

Le crash de l’avion dans l’Atlantique a tué 216 passagers et 12 membres d’équipage. Au total, seuls 156 corps ont été récupérés, soit dans les premiers jours suivant l’accident, soit deux ans plus tard, au moment de la découverte de l’épave à 3 900 mètres de fond.

Nadine Reichl, 24 ans, a rendu hommage à sa sœur Katja, qui devait rentrer de vacances au Brésil avec une amie le 1er juin 2009.

Une sœur qui était son « modèle », « toujours présente », « voulait changer le monde, aider les gens » et travaillait à l’hôpital.

« Il n’y a pas suffisamment de mots pour vous expliquer à quel point elle était importante pour nous, nous l’avons tellement aimée que son décès a changé ma famille pour toujours », a-t-elle déclaré, très émue.

Treize années plus tard, « nous souffrons et nous souffrirons notre vie entière ».

Pendant les deux ans de recherche de l’épave, « nous avons vécu sans savoir. Nous savions qu’il n’y avait aucune chance pour retrouver des survivants, mais malgré tout, je n’ai jamais cessé d’espérer ».

La jeune femme a finalement été enterrée en 2011 « dans sa ville natale ». Mais seule une petite partie de son corps a été retrouvée, source d’« une tristesse infinie » pour sa sœur.

La position d’Air France et d’Airbus, qui contestent toute responsabilité dans la survenue de l’accident, « ce n’est pas la voie juste et c’est irrespectueux, envers les pilotes, […] envers les familles. Et d’un point de vue des faits, c’est faux », a terminé Nadine Reichl.

Crédits image et texte : Ouest France©
Source : https://www.ouest-france.fr/societe/justice/proces-du-crash-rio-paris-je-n-ai-jamais-cesse-d-esperer-les-proches-des-victimes-temoignent-28155864-6b56-11ed-a4bc-1fa2e638806c