Procès du 13-Novembre. Sécurité musclée, ambiance, retards… On vous raconte l’envers du décor

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Publié le 22/06/2022 13:18:15

Mercredi 29 juin, la cours d’assises spéciale de Paris rendra son verdict après dix mois d’audiences que Ouest-France a racontées au quotidien. Dans une série d’articles, nous revenons sur cet évènement hors normes. Aujourd’hui, le déroulé d’une journée ordinaire au procès du 13 novembre 2015.

Quand le dauphin de la place Dauphine, dans la chanson de Jacques Dutronc, s’éveille, il est 5 heures. Mais pour le procès du 13 novembre 2015, quand le palais de justice dont l’arrière du bâtiment donne sur la célèbre place, ouvre ses portes, il est plutôt 11 h 30. L’audience, elle, débutera une heure plus tard, en pleine pause déjeuner.

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La justice a, sur ce point, tiré les leçons du procès des attentats de janvier 2015. Faire débuter l’audience à 9 h aurait impliqué de faire lever, chaque jour, les détenus bien avant 6 h du matin étant donné les contraintes de sécurité et les temps de trajet. Lors du procès de Charlie Hebdo , les accusés n’avaient parfois dormi que quatre à cinq heures par nuit. Pas tenable pour le procès du 13-Novembre qui aura duré dix mois.

Mais avant d’accéder à la salle d’audience, avocats, parties civiles et journalistes doivent passer par plusieurs points de contrôle. Un premier à l’extérieur, devant un chien renifleur. Puis dans le hall, comme dans un aéroport, chacun est soumis aux portiques de détection et aux scanners à rayons X. Il faut vider son sac, enlever son ceinturon, boire une gorgée d’eau de sa bouteille, devant un gendarme, pour être sûr qu’elle ne contienne que de l’eau… Enfin, vous accédez à un périmètre, au sein du palais de justice, exclusivement réservé au procès du 13-Novembre. Toute personne sortant de cet espace dédié, à la pause par exemple, doit repasser par ces contrôles. Parallèlement, dans le reste du Palais de justice, une cinquantaine d’autres audiences se tiennent chaque jour.

Au bout d’un long couloir, vous atteignez le hall des pas perdus d’où vous pouvez rejoindre l’une des deux salles principales. Non sans avoir fait vérifier votre accréditation et votre pièce d’identité à deux autres reprises. Sur les bancs des couloirs, avocats et journalistes avalent vite fait une salade ou un sandwich. Les trois accusés qui comparaissent libres, passent devant eux, encadrés par des forces de l’ordre. Ils ne sont pas les seuls ainsi sous protection : les magistrats et les trois avocats généraux sont également escortés jusqu’à la salle d’audience.

Il est environ 12 h 45, l’audience peut débuter. Toujours avec un peu de retard. Et un peu plus encore, lorsque durant des mois, un des accusés, Osama Krayem, a refusé de venir dans le box. Pour des questions de procédure, chaque jour, le président fut donc tenu de suspendre l’audience durant vingt minutes, le temps de faire constater, par huissier, le refus de l’accusé de venir. Afin ensuite de pouvoir passer outre son absence. Il est un peu plus de 13 h, l’audience peut enfin débuter…

Qu’elle est grande, la salle d’audience principale menuisée de bois clair. Plus encore lorsqu’elle est peu remplie, ce qui fut régulièrement le cas lors des auditions des enquêteurs belges et des experts. Pouvant contenir 550 places, longue de 45,50 m, les victimes qui appréhendaient de témoigner, ont sans doute trouvé le temps long lorsqu’ils ont dû parcourir l’allée centrale jusqu’à la barre. Avec, à leur gauche, le box des accusés et leurs avocats, et à leur droite, les avocats des parties civiles. Pourtant, au fil des semaines, chacun a su trouver sa place, ses repères, finissant par s’asseoir sur le même banc ou près du même écran suspendu : une dizaine a été installée pour que chacun puisse voir celles et ceux qui s’exprimaient à l’autre bout de la salle. Et tous ont fini par s’accommoder de la raideur des bancs qui sont au confort ce que les lattes en bois sont à la literie…

A chaque pause, avocats, journalistes et parties civiles se retrouvent sur les marches du palais de justice. Le temps d’un café ou d’une cigarette électronique, chacun débrieffe ​le dernier témoignage entendu, évacue son stress ou poursuit son déjeuner. Des victimes qui portent un tour de cou rouge, signe qu’elles ne veulent pas s’exprimer dans les médias, papotent volontiers avec des journalistes. L’instant est informel. Suspendu.

Les trois accusés qui comparaissent libres, sont là aussi. Un peu en contrebas des marches, dans un renfoncement. Personne ne les importune, si ce n’est parfois pour les saluer en les croisant. Je voudrais remercier les parties civiles qui viennent nous dire bonjour. Cela me fait chaud au cœur. Cela me fait sentir comme étant à nouveau Ali et pas comme un accusé des attentats​, a témoigné, en larmes, Ali Oulkadi, l’un de ces trois accusés comparaissant libres. Il est poursuivi pour avoir accompagné Salah Abedslam, rentré en Belgique, dans l’une de ses planques, le 14 novembre 2015.

Au total, près d’une soixantaine de personnes (personnel d’accueil, techniciens, psychologues…) ont chaque jour permis à l’audience de se tenir. Sans oublier des dizaines de gendarmes et policiers. Quand ce procès sera fini, tout cela va nous manquer​, appréhende déjà une avocate.

Retrouvez l’intégralité de notre supplément « Un procès pour l’histoire ».

Crédits image et texte : Ouest France©
Source : https://www.ouest-france.fr/faits-divers/attentats-paris/proces/au-quotidien-le-proces-des-attentats-du-13-novembre-a-l-ecart-du-monde-09e96e56-f13b-11ec-8c70-9d4fe0897a25