Procès Bygmalion : le réquisitoire a débuté pour Sarkozy et ses co-prévenus

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Publié le 17/06/2021 12:42:41

Nicolas Sarkozy, jugé pour « financement illégal de campagne électorale », encourt un an de prison et 3 750 euros d’amende

Après presque un mois de procès, le réquisitoire à l’encontre de Nicolas Sarkozy et de 13 autres prévenus dans l’affaire des dépenses excessives de la campagne présidentielle de l’ex-chef de l’État en 2012 a commencé ce jeudi matin au tribunal correctionnel de Paris. La procureure Vanessa Perrée a ouvert le bal de ce réquisitoire à deux voix, qui devrait durer jusqu’à l’après-midi.

« L’important n’était pas le plafond légal de campagne mais de gagner l’élection […] l’argent ne comptait pas », a dit Vanessa Perrée au début de son réquisitoire. Elle a dénoncé des « dérives financières majeures » et un « système opaque ». « Quoiqu’on vous en dise - vous avez entendu Nicolas Sarkozy contester vigoureusement », dit-elle au tribunal, la campagne a été marquée par une « improvisation et une impréparation totale ».

Qui a donné l’ordre de la fraude ?

Tout au long des débats, les anciens cadres de l’UMP (devenue Les Républicains) et de Bygmalion, qui organisait ses meetings, le directeur de campagne, les experts-comptables, ont tous cherché à minimiser leur rôle, voire à le nier.

Non, ils n’ont pas mis en place le système de fausses factures imaginé pour masquer l’explosion des dépenses de campagne du président candidat à sa réélection. Révélé deux ans après la défaite de Sarkozy, le scandale avait entraîné des déflagrations en série à droite.

Absent à toutes les audiences, l’ex-chef de l’État ne s’est présenté devant le tribunal que pour son interrogatoire mardi. Contrairement aux autres prévenus, soupçonnés d’être impliqués à des degrés divers dans la fraude, Nicolas Sarkozy est, lui, uniquement jugé pour « financement illégal de campagne électorale ». Il encourt un an de prison et 3 750 euros d’amendes.

Les autres prévenus, qui comparaissent notamment pour « faux, usage de faux », « escroquerie » et complicité de ces délits, encourent jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.

L’enquête a révélé que le prix réel des 44 meetings organisés par l’agence événementielle Bygmalion avait été drastiquement réduit - 80 % des factures ont disparu - et le reste réglé par l’UMP au nom de conventions fictives du parti. Durant les quatre semaines d’audience, le tribunal présidé par Caroline Viguier a moins eu à établir la matérialité des faits que de tenter d’identifier le rôle de chacun. Une question, posée et reposée, restera vraisemblablement sans réponse : qui a donné l’ordre de la fraude ?

« Invraisemblable ! »

L’enquête « n’a pas établi » que Nicolas Sarkozy l’aurait « ordonné », qu’il y aurait « participé », ni même qu’il en aurait été informé, selon l’accusation. Par contre, il en a « incontestablement » bénéficié, disposant ainsi de « moyens bien supérieurs à ceux que la loi autorisait ». Le plafond légal a été dépassé de 22 millions d’euros. Une thèse vigoureusement contestée par le chef de l’État pendant ses quatre heures d’interrogatoire.

Il n’y a eu « aucun emballement » de sa campagne, qui ressemblait « comme une sœur » à celle de 2007, voire à celle de son opposant au second tour, François Hollande, a martelé à la barre Nicolas Sarkozy. Comment la campagne de 2012 aurait-elle alors pu « coûter le double », a-t-il scandé. « Invraisemblable ! »

L’ancien patron de l’UMP Jean-François Copé, entendu comme simple témoin dans le procès, a fustigé jeudi sur France Inter la « stratégie de défense intenable » de Nicolas Sarkozy et son incapacité à « assumer » ses actes.

« Je n’y crois pas »

Trois ex-cadres de Bygmalion ont décrit au procès comment l’UMP leur avait demandé de mettre en place le système de fausses factures. Au parti, seul Jérôme Lavrilleux en a reconnu l’existence. La campagne était devenue « une dinguerie » d’une « inorganisation totale », a raconté ce dernier à la barre. « Peu importe ce que ça coûtait, l’important c’était de gagner. On a tous baigné dans cette atmosphère ».

Quant à l’organisateur des meetings chez Bygmalion, Franck Attal, il avait reçu une consigne : «’il faut que ça pète, qu’on sente la chaleur dans la salle, il faut mettre le paquet’», a-t-il décrit.

« Je n’y crois pas », a répété Nicolas Sarkozy durant son interrogatoire. Pour lui, Bygmalion - fondé par des proches de son rival Jean-François Copé - s’est « gavé » sur sa campagne. « Il y a eu des fausses factures et des conventions fictives, c’est avéré ». Mais « l’argent n’a pas été dans ma campagne, sinon ça se serait vu », s’est-il emporté. On aurait dit : ‘Sarkozy est devenu fou, il donne du caviar au public de ses meet

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