Prisons : le gouvernement sommé d’agir contre la surpopulation carcérale

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Publié le 16/06/2022 05:51:40

Deux ans après avoir été condamnée par l’Europe pour ses conditions indignes de détention, la France est appelée par deux ONG à agir en urgence pour en finir avec une surpopulation carcérale chronique.

L’Observatoire international des prisons (OIP) et Amnesty International appellent ce jeudi la France à rendre ses prisons dignes en mettant en œuvre en urgence un plan national d’actions contre la surpopulation carcérale, qui atteint des niveaux records.

Deux ans après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) pour ses conditions de détention indignes et un surpeuplement chronique, l’état des lieux est toujours aussi sévère. Au 1er mai, les prisons françaises comptaient 71 038 détenus pour 60 722 places opérationnelles, « un chiffre plus élevé encore » qu’en janvier 2020, quand la CEDH intimait à la France de résorber définitivement sa surpopulation dans ses prisons. Les deux ONG s’alarment de « l’inefficacité des mesures prises par les pouvoirs publics » pour se mettre « en conformité » avec la décision européenne.

Certes, dans la foulée de la condamnation de la France, la population carcérale chutait drastiquement, conséquence de la crise sanitaire. Mais « faute d’une politique volontariste », le nombre de détenus « n’a cessé de croître » à partir de l’été 2020, déplore l’OIP. Avec un taux de densité carcérale allant jusqu’à 138,9 % selon les établissements, les conditions de détention sont « particulièrement dégradées et dégradantes, (…) exacerbées par la vétusté et l’insalubrité d’une proportion importante des établissements pénitentiaires », souligne l’association. Cette situation ne peut qu’accroître les violences en prison : Près de 8 000 cas de violence entre détenus par an en moyenne, et 4 500 à l’encontre du personnel.

36000 places de prison ont été créées mais « plus on construit plus on remplit »

« Quel retour à la vie normale peut-on attendre de personnes qui, en prison, ont été entassées à trois dans 4,40 m2 d’espace vital, durant des mois, et souvent 22 heures sur 24, au milieu de rats, cafards et punaises de lit ? », s’interrogeait il y a deux semaines la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) Dominique Simonnot. Une cellule standard mesure 9 m2, 4,4 m2 quand on soustrait l’emprise des meubles et des sanitaires.

L’OIP pointe à nouveau « l’impasse » d’une politique « qui consiste à accroître de manière continue le nombre de places de prisons, à la fois coûteuse et contreproductive ». « Depuis trente ans, plus de 36 000 places de prison ont été créées sans effet sur la surpopulation et l’adage selon lequel + plus on construit, plus on remplit + s’est toujours vérifié », argumente l’association.

Inefficaces à « résoudre le problème structurel du surpeuplement », les réformes engagées ces dernières années « passent largement à côté des facteurs à l’origine de l’inflation carcérale », estime l’OIP. Le rapport suggère de réorienter les fonds dévolus à l’extension du parc pénitentiaire à la rénovation des prisons existantes, au développement d’activités en détention et à la réinsertion. Le rapport recommande la mise en place d’un plan national centré sur la dépénalisation de certains délits (conduite sans permis, consommation de stupéfiants), la réduction du recours à la détention provisoire et le développement des mesures non-privatives de liberté. La CGLPL, autorité administrative indépendante jugeait, elle, nécessaire de « développer » les peines alternatives à la prison, « contraignantes, encadrées et surtout tournées vers la réinsertion ».

Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/prisons-le-gouvernement-somme-dagir-contre-la-surpopulation-carcerale-16-06-2022-FVL4NBBH4FHHDIPASVHDYPU4RA.php