Opération Wuambushu : ce que l’on sait de la suspension, à Mayotte, de l’évacuation d’un bidonville

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Publié le 25/04/2023 05:28:28

L’évacuation d’un bidonville devait débuter dans la nuit mais elle a été suspendue par les juges. L’État va faire appel, a annoncé la préfecture de Mayotte.

Le tribunal de Mamoudzou a suspendu l’évacuation d’un bidonville à Mayotte, prévue mardi dans le cadre de l’opération contre la délinquance et l’habitat insalubre menée dans le département français de l’océan Indien.

L’évacuation de ce bidonville, situé à Koungou à proximité de Mamoudzou, initialement prévue mardi à partir de 6 heures locales, dans le cadre de l’opération « Wuambushu », a été suspendue, la justice constatant « l’existence d’une voie de fait », tenant aux conditions d’expulsion jugées « irrégulières » par les personnes s’opposant à l’expulsion.

« Je suis consternée, mais pas surprise. À Mayotte, on a le sentiment d’avoir une justice qui travaille contre nous », a réagi au micro de Franceinfo Estelle Youssouffa, députée LIOT de Mayotte.

« L’opération n’est pas arrêtée », rappelle-t-elle, évoquant l’aspect du « maintien de l’ordre » orchestré par cette opération. « Sur cette partie-là de cette opération, il y a aussi la mobilisation des forces de l’ordre pour faire expulser sur des terrains privés. »

La préfecture fait appel de la décision

« Le préfet de Mayotte prend acte de la décision du tribunal de Mamoudzou. Il a demandé aux avocats de l’État de faire appel », a indiqué la préfecture de Mayotte. Le préfet Thierry Suquet avait affirmé lundi que la France « n’arrêtera(it) pas » les opérations de lutte contre la délinquance et l’habitat insalubre pour lesquelles quelque 1 800 membres des forces de l’ordre ont été déployés sur l’île.

Peu après 6 heures, des affrontements sporadiques avaient lieu sur place entre des jeunes du quartier et des forces de l’ordre déployées en grand nombre. Pas très loin, des émeutes ont eu lieu entre les forces de l’ordre et les habitants du bidonville voisin de « Majicavo Dubaï » dès l’aube.

Des barricades de poubelles et pneus avaient été installées tout le long de l’axe principal de l’île menant au secteur. Les forces de l’ordre, prises à partie par des jets de pierres ont répliqué par des tirs nourris de LBD et grenades lacrymogènes.

Les Comores refusent l’accostage d’un bateau

Dans le cadre de l’opération baptisée Wuambushu (« reprise » en mahorais), la France prévoit de déloger des migrants en situation irrégulière des bidonvilles de Mayotte, 101e département français, et d’expulser les sans-papiers vers Anjouan, l’île comorienne la plus proche située à 70 km.

De nombreux migrants africains, surtout comoriens, tentent chaque année de rallier clandestinement Mayotte. Ces traversées hasardeuses prennent souvent une tournure dramatique avec des naufrages de « kwassa kwassa », petites embarcations de pêche à moteur utilisées par les passeurs.

Mais les Comores ont refusé lundi l’accostage d’un navire transportant une soixantaine de personnes. Le représentant de l’État a dit espérer « reprendre rapidement » les rotations de bateaux vers l’île d’Anjouan. « On a des leviers, geler les avoirs des Comoriens à Mayotte, geler les visas… » a déclaré en réaction Estelle Youssouffa. « Aujourd’hui est une date particulière, a souligné la députée, puisque le 25 avril 1841, l’île a été vendue à la France « pour 1000 piastres ». Elle a évoqué un souvenir « important et douloureux pour nous, ça fait plus d’un siècle et demi qu’on subit les assauts des Comores ».

Faisant géographiquement partie de l’archipel comorien, Mayotte s’est séparée des Comores en 1974, à la suite d’un référendum où les trois autres îles ont choisi l’indépendance. Elle est devenue département français en 2011, mais les Comores refusant toujours d’y reconnaître la souveraineté de la France. Moroni s’était engagé en 2019 à « coopérer » avec Paris sur l’immigration, en échange d’une aide au développement de 150 millions d’euros sur trois ans.

Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/mayotte-le-tribunal-suspend-levacuation-dun-bidonville-25-04-2023-JRUA45OLTFF6LJWWN2I5DCEWCA.php