La Rochelle : le psychiatre suspendu quatre mois pour « manquement à la moralité »

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Publié le 17/06/2021 09:12:23

L’ancienne patiente avait porté plainte pour abus de faiblesse. Pendant plusieurs mois, ils avaient entretenu des relations sexuelles au sein du cabinet et lors des consultations

« Un manquement caractérisé aux règles de dignité et de moralité que tout praticien est tenu de respecter. » Voilà ce que la Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins, qui siège à Paris, reproche à ce psychiatre rochelais dans son jugement rendu le mois dernier. Le médecin, bien connu sur la place rochelaise et qui exerce en libéral, vient d’être condamné à « une interdiction d’exercer pendant une durée de six mois, dont deux mois assortis d’un sursis ». La décision est effective depuis ce 1er juin 2021 et court ainsi jusqu’au 30 septembre prochain.

« Beaucoup de femmes n’osent pas porter plainte parce que quand ça vous arrive, vous vous sentez coupable »

En 2018, une de ses anciennes patientes avait porté plainte pour abus de faiblesse. Pendant plusieurs mois, ils avaient entretenu une relation « amoureuse » et des rapports sexuels au sein même du cabinet et à des heures de consultation. C’est bien cette faute que les membres du Conseil de l’ordre ont retenue. Ils n’ont pas en revanche reconnu l’emprise psychologique. La plaignante n’aurait, selon eux, « pas produit d’éléments probants pour démontrer un état de dépendance ».

C’est néanmoins une victoire pour l’ex-patiente au terme de deux ans de procédure. « C’est une satisfaction. Il faut dire que c’est possible. Il faut être tenace, c’est fastidieux, il y a de grandes périodes de découragement mais il y a encore trop de femmes qui n’osent pas porter plainte, parce que quand ça vous arrive, vous vous sentez coupable et vous ne voulez surtout rien dire », explique la jeune femme.

Transfert affectif

En 2019, en pleine libération de la parole des femmes sur des affaires de harcèlements et de viols, Nathalie (nous avons changé son prénom pour préserver son anonymat) avait poussé la porte de notre rédaction pour nous raconter le piège d’une emprise psychologique. En 2012, au bord du burn-out, elle était allée voir un psychiatre « pour prendre de la hauteur et s’affirmer davantage ». Elle ne le voit pas tout de suite venir, mais elle fait un transfert affectif et tombe amoureuse de son thérapeute. Au bout de deux ans, c’est le passage à l’acte. Pendant trois mois, ils vont avoir des relations sexuelles, une ou deux fois par semaine. Il lui donne rendez-vous au cabinet, elle est consentante (du moins le croit-elle). Hypnotisée par un homme qu’elle met sur un piédestal mais aussi par un professionnel qui n’a pas su gérer le contre-transfert alors qu’il en a les clés.

Avec l’aide d’une autre psy, elle finit par comprendre que c’est elle la victime. En 2018, elle écrit une longue lettre à l’Ordre des médecins de Charente-Maritime. L’affaire reste sans suite mais Nathalie décide de porter plainte. En 2019, la chambre de Nouvelle-Aquitaine condamne le thérapeute à une interdiction d’exercer pendant six mois. Le psychiatre avait fait appel. Le dossier traînera jusqu’à ce mois de février 2021 où les deux parties sont convoquées par la Chambre nationale. En témoignant, Nathalie avait voulu rompre le silence pour que « ce médecin ou d’autres ne recommencent pas ». C’est encore le même état d’esprit qui l’a animée en nous rapportant la suspension du psychiatre pour quatre mois.

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