Essonne : le mari de Sylvie, empoisonnée il y a 16 ans, condamné pour non-assistance à personne en danger

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Publié le 23/04/2023 06:45:00

Sylvie, 64 ans, se trouve dans le coma depuis l’ingestion de médicaments en 2007 à son domicile de Morsang-sur-Orge. Son mari a bénéficié d’un non-lieu pour l’empoisonnement. Il a néanmoins été condamné à non-assistance à personne en danger ce vendredi par le tribunal d’Evry-Courcouronnes.

Il n’a pas empoisonné sa femme. Mais pour la justice, il ne lui a pas porté secours. Ce vendredi, Arnaud, 59 ans, a été condamné à trois ans de prison avec sursis pour « non-assistance à personne en danger » par le tribunal correctionnel d’Evry-Courcouronnes. Il a été reconnu coupable de ne pas avoir appelé immédiatement les secours alors que l’état de santé de sa femme, Sylvie, s’est brusquement dégradé le 21 juin 2007 à leur domicile de Morsang-sur-Orge (Essonne). Aujourd’hui âgée de 64 ans, Sylvie se trouve toujours dans un état végétatif, alitée dans une clinique de l’Häy-les-Roses (Val-de-Marne).

Cette décision jette le trouble sur les circonstances de la maladie de Sylvie. Sa mère Claudine, 91 ans, se bat depuis seize ans pour obtenir la vérité sur l’empoisonnement de sa fille. Nous l’avions rencontrée en mars. Elle continue à lui rendre visite tous les jours. Et n’a jamais abandonné la procédure judiciaire.

Sylvie voulait divorcer

En 2007, Sylvie, âgée de 48 ans à l’époque, est hospitalisée en urgence car une mousse rosâtre sort de sa bouche. Le mari la croise inconsciente à 17 heures mais il n’appelle les secours que le lendemain matin. Les enquêteurs de la sûreté départementale de l’Essonne s’intéressent rapidement à Arnaud. Le couple, marié depuis 1990, tanguait. Sylvie avait rencontré un autre homme et voulait divorcer.

Ce jour-là, Arnaud rentre du travail vers 16 heures. Il a expliqué avoir bu une bière avec Sylvie. Le mari repart ensuite chercher les enfants de 7 et 9 ans à l’école. Il a raconté aux policiers avoir trouvé Sylvie endormie sous la véranda : « Je l’ai remise sur sa chaise puis je suis sorti avec les enfants faire les courses. De retour à la maison, j’ai constaté qu’elle dormait toujours. Je l’ai prise dans mes bras et je l’ai allongée dans le lit du rez-de-chaussée. Elle ne s’est pas réveillée. » Vers 20 heures, elle est toujours dans la même position. Les enfants diront plus tard avoir vu leur maman saliver beaucoup. Arnaud, lui, affirme n’avoir rien remarqué.

Dans son jugement rendu ce vendredi, le tribunal a estimé que Sylvie se trouvait ce 21 juin 2007 en « état de péril imminent », et ce « dès l’après-midi ». « Elle présentait un état justifiant un secours de votre part, dont vous aviez conscience, explique la présidente du tribunal à Arnaud, aux cheveux poivre et sel, vêtu d’un manteau beige. Vous n’avez délibérément pas appelé les secours. »

Le prévenu avance l’hypothèse du suicide

Lors d’une audience « éprouvante », le mari a déclaré qu’il était « toujours amoureux » de sa femme, mais n’a exprimé « aucun regret, aucun remord », selon la présidente. Selon le tribunal, le fait de ne pas appeler les secours a eu des « conséquences indiscutables sur l’aggravation de l’état de santé » de Sylvie, et « contribué à l’affliction de ses proches, y compris ses enfants ».

Alors qu’il était soupçonné du pire, Arnaud, lui, a toujours envisagé que sa femme avait tenté de se suicider. Car Sylvie a déjà attenté à ses jours auparavant. Les analyses toxicologiques décèleront dans son sang du grésil, un désinfectant, et du midazolam, un puissant anxiolytique, ainsi que de la morphine.

Mais cette hypothèse du suicide est inenvisageable pour certains proches de Sylvie. Il lui est bien déjà arrivé de prendre des somnifères, mais c’était, disait-elle, pour échapper au harcèlement d’Arnaud. Car cette infirmière avait confié à des collègues être surveillée par son mari depuis qu’elle voulait divorcer. Il avait placé des micros dans la maison.

Il découvre un SMS de l’amant

Ce jour-là, Arnaud avait découvert un SMS de son amant dans le portable de Sylvie. L’amant disait : « Je t’aime, mon bébé. » Arnaud l’avait l’appelé : « Tu es content de toi, tu as bien foutu le bordel dans mon couple, on va divorcer. » Après avoir feint de découvrir cette relation ce jour-là, il a reconnu au cours de l’enquête qu’il savait depuis bien plus longtemps.

Par ailleurs, pourquoi avait-il demandé à solder le compte bancaire de sa femme sur lequel se trouvait une somme importante provenant d’un héritage ? La thèse du suicide, elle, était mise à mal par plusieurs éléments matériels. Pour autant, le juge d’instruction a estimé à l’époque qu’elle ne pouvait pas être formellement exclue. La non-assistance à personne en danger, elle, a bien été retenue ce vendredi. Plus de 16 ans après que Sylvie soit tombée dans le coma.

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Source : https://www.leparisien.fr/essonne-91/essonne-le-mari-de-sylvie-empoisonnee-il-y-a-16-ans-condamne-pour-non-assistance-a-personne-en-danger-23-04-2023-5CV2BPGFFJHZ3EATZHOPAUJRKY.php