

Publié le 30/04/2023 12:00:07
Désormais interdit de tout don de sperme par la justice néerlandaise sous peine d’une amende de 100 000 euros, cet homme de 41 ans interroge par son profil et ses motivations.
Jonathan Meijer aurait permis la conception de plus de 550 enfants en Europe. Ce Néerlandais de 41 ans vient d’être interdit de tout nouveau don de sperme par un tribunal de La Haye (Pays-Bas), après qu’une association d’enfants nés de dons de sperme a porté plainte contre lui. S’il contrevient à cette interdiction, il devra à chaque fois s’acquitter d’une amende de 100 000 euros.
Mais les Pays-Bas s’interrogent désormais sur ce quadragénaire au profil complotiste et anti-médecine, qui pourrait faire appel pour avoir le droit de continuer ses dons auprès de couples volontaires.
Un homme qui ne « croit pas en la théorie de l’évolution »
Peu d’éléments permettent de retracer la vie de Jonathan Meijer. Ce Néerlandais serait issu d’une famille nombreuse, dont les parents sont mariés « depuis 50 ans », détaille-t-il dans une vidéo sur YouTube. Il a récemment voyagé en Tanzanie et au Kenya, ce qui a causé le report de son procès d’un mois, note le quotidien néerlandais De Telegraaf.
Dans ses vidéos, l’homme évoque le pouvoir des pierres, mais aussi son alimentation, notamment à bases de produits crus. Il se met en scène en train de manger des abats, de la viande et des œufs crus, ainsi que du lait non pasteurisé. Il se déclare contre la crème solaire, et plaide pour un retour à la vie primitive.
Il affirme d’ailleurs en août 2022 ne pas croire en la théorie de l’évolution, mais « en Dieu et en la nature ». « C’est le plus gros mensonge, la plus grosse théorie du complot qui existe. (…) C’est naturel d’avoir une grande famille. » Ses publications ne rencontrent pas un grand succès, elles dépassent quelques milliers de vues pour les plus populaires. Pendant plusieurs années, il a également composé de la musique, qu’il a publiée sur sa chaîne.
Des dons motivés par la volonté d’aider des parents
Si son profil questionne, ses vidéos n’offrent que peu de réponses à ses motivations dans un pays où le don de sperme n’est rémunéré que de façon marginale et ne lui aurait pas permis de vivre convenablement. « On me présente comme une sorte de taureau fou avec un besoin de reproduction. Mais ce n’est pas vraiment ce que je suis », a assuré le quadragénaire à son procès.
Les premiers dons de sperme de Jonathan Meijer remontent à 2007. La législation n’a pas été modifiée aux Pays-Bas depuis cette date : les dons ne sont pas anonymes, un donneur ne peut donner son sperme qu’à 12 femmes au maximum et ne peut concevoir plus de 25 enfants. Pourtant en 2017, un premier scandale éclate. Jonathan Meijer est placé sur une « liste noire » des donneurs, après que les autorités ont découvert qu’il était déjà géniteur de 102 enfants, via des dons dans de multiples cliniques néerlandaises.
Il s’était alors expliqué auprès du quotidien néerlandais Algemeen Dagblad : « Mon but n’était pas d’avoir autant d’enfants que possible. J’aime rendre les gens heureux. La gratitude des médecins et des futurs parents est grande. J’ai aidé des gens qui, autrement, seraient restés sans enfant. C’est parfois oublié. »
Depuis six ans, les cliniques néerlandaises n’acceptent plus de don de sa part. Mais celui-ci a continué à aider des couples, que ce soit via des contacts directs ou via des banques de sperme danoises. Dans sa lettre de motivation auprès de l’une d’entre elles, dont le journal Algemeen Dagblad a eu copie, le Néerlandais justifie à nouveau son choix : « À la fin de la vingtaine, je me suis dit que je voulais faire quelque chose d’utile (…) Puis j’ai commencé à sentir que je voulais aider les autres à fonder une famille. »
S’il admet qu’il a menti aux futurs parents sur le nombre d’enfants donneurs, il ne voit cependant aucun danger pour la santé et le bien-être psychologique des enfants, rapporte l’Algemeen Dagblad.
Des fausses identités utilisées à l’étranger, la France concernée
Selon De Telegraaf, l’homme a parfois utilisé de faux noms « comme Ruud ou Pepijn » pour faire des dons à l’étranger. Lors de son procès, l’avocat des parties civiles a cité « l’Allemagne, la France et la Belgique », comme les pays où il aurait effectué des dons « récemment ».
Le Néerlandais a « délibérément mal renseigné » les parents sur le nombre d’enfants qu’il avait conçus, afin de « les pousser à le choisir comme donneur », a tranché le juge à l’issue de son procès.
« Tous ces parents sont désormais confrontés au fait que leurs enfants font partie d’un vaste réseau de parenté, avec des centaines de demi-frères et sœurs, qu’ils n’ont pas choisis », a déploré le magistrat, cité par la télévision publique NOS.
Aujourd’hui, Jonathan Meijer aurait permis de concevoir des enfants en Australie, en Italie, en Serbie, en Ukraine, en Allemagne, en Pologne, en Hongrie, en Suisse, en Roumanie, au Danemark, en Suède, au Mexique et aux États-Unis.
Une faille administrative exploitée pendant des années
Alors comment a-t-il pu concevoir autant d’enfants sans que cela n’alerte les autorités plus tôt ? La réponse est très simple selon le quotidien néerlandais De Telegraaf : « Il n’existe pas de répertoire national des donneurs de sperme. »
Les différentes cliniques ne s’échangent pas les identités de leurs donneurs, ce qui a permis à l’homme de faire des dons dans de multiples établissements, rien qu’aux Pays-Bas sans être repéré pendant des années, jusqu’à son placement sur « liste noire ». Cette information n’a pas été communiquée auprès de structures étrangères, ce qui lui a permis de continuer jusqu’à récemment.
En marge de sa condamnation, Jonathan Meijer est désormais dans l’obligation de fournir une liste complète des cliniques et établissements auxquels il a fait des dons pour destruction de ses échantillons. S’il s’avère que la liste n’est pas complète, il devra payer une amende de 25 000 euros par établissement manquant.
« Le fait que j’ai engendré un grand nombre d’enfants en tant que donneur n’est pas unique, ni aux Pays-Bas, ni en Belgique, ni dans le monde », a-t-il réagi auprès de la télévision publique NOS, avant d’indiquer qu’il pourrait faire appel de la décision de justice. « Si de futurs parents m’approchent, je veux être libre de leur répondre », avait-il expliqué devant le tribunal, souhaitant pouvoir faire un don « dans des cas occasionnels », cité par RTL Nieuws.
Face au scandale provoqué par cette affaire, la Chambre des représentants néerlandaise a voté un projet de loi renforçant les réglementations sur le don de sperme et garantissant les intérêts de l’enfant né d’un don.
Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/don-de-sperme-aliments-crus-et-fausses-identites-qui-est-jonathan-meijer-lhomme-aux-550-enfants-30-04-2023-4VGBKKVKPJCVVLOWBXM2C5CVVM.php