Catastrophe ferroviaire en Grèce : la colère dégénère en violences, le chef de gare en détention

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Publié le 05/03/2023 21:34:58

Le chef de gare qui a reconnu sa responsabilité dans la collision frontale de deux trains sur la même voie, a été inculpé et placé en détention provisoire. Ce dimanche, les protestations contre la vétusté présumée des équipements ferroviaires ont viré en incidents violents à Athènes.

Le chef de gare, mis en cause pour une erreur fatale qui a conduit à une collision ferroviaire qui a coûté la vie à au moins 57 personnes en Grèce mardi, a été placé en détention provisoire dimanche. À Larissa, la ville la plus proche des lieux de cet accident, il a été inculpé pour sa responsabilité présumée dans « la mort d’un grand nombre de personnes », un crime passible d’une peine allant de dix ans de prison à la perpétuité, selon le Code pénal grec.

Vassilis Samaras, 59 ans, dont l’identité a été révélée par le ministère des Transports, a reconnu sa responsabilité dans la collision frontale entre un train transportant 342 passagers et dix employés des chemins de fer, reliant Athènes à Thessalonique dans le nord du pays, et un convoi de marchandises. Les deux trains se sont heurtés frontalement alors qu’ils se trouvaient sur la même voie depuis plusieurs kilomètres.

« Nous ressentons une rage immense ! »

Mais les manifestants, dimanche à Athènes, réclamaient que soient recherchées les responsabilités dans l’état présumé de vétusté des équipements ferroviaires, qui a laissé le destin des passagers entre les mains d’un chef de gare inexpérimenté. « À bas les gouvernements assassins ! », « Ce n’était pas une erreur humaine ! », lisait-on sur les banderoles brandies par les quelque 12 000 personnes qui criaient leur colère sur la place Syntagma, la grande esplanade devant le Parlement de la capitale grecque. Les manifestants ont lâché des centaines de ballons noirs pour rendre hommage aux victimes.

Ce drame a suscité une immense colère face aux négligences et aux lacunes dans les chemins de fer. Et le rassemblement athénien, le quatrième depuis l’accident, a dégénéré en violents incidents. Des manifestants ont lancé des cocktails Molotov et la police a répliqué avec des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes, ont constaté des journalistes de l’AFP.

« Nous ressentons une rage immense ! », a résumé dans le cortège Michalis Hasiotis, président du syndicat des experts-comptables. « L’appât du gain, le manque de mesures prises pour la protection des passagers a conduit à la pire tragédie ferroviaire dans notre pays ».

« Rien ne va dans ce pays, les hôpitaux sont à l’agonie, les écoles ferment, les forêts brûlent… Ils se moquent de qui ? », a renchéri Nikos Tsikalakis, président d’un syndicat des chemins de fer. La plupart des victimes étaient des jeunes et des étudiants rentrant à Thessalonique, la grande ville universitaire, après un week-end prolongé.,

À la télévision, des images déchirantes de parents en pleurs, attendant désespérément devant un hôpital des informations sur le sort de leurs enfants, ont aussi contribué à jeter l’opprobre sur les autorités et leur gestion jugée calamiteuse de cette catastrophe.

Le Premier ministre demande pardon

Dimanche matin, avant une cérémonie religieuse à la cathédrale orthodoxe d’Athènes, le Premier ministre conservateur Kyriakos Mitsotakis a demandé pardon aux familles des victimes dans une adresse solennelle. « En tant que Premier ministre, je dois à tous, mais surtout aux proches des victimes, (de demander) pardon », a-t-il écrit.

« Dans la Grèce de 2023, il n’est pas possible que deux trains circulent en sens inverse sur une même ligne et que personne ne le remarque ». « Nous ne pouvons pas, ne voulons pas et ne devons pas nous cacher derrière l’erreur humaine » imputée au chef de gare, a-t-il insisté.

Le manque d’expérience du chef de gare est en effet dénoncé depuis le lendemain du drame. Selon les médias grecs, il n’avait reçu qu’une courte formation avant de se retrouver seul, au poste de chef de gare, alors que le trafic sur cette ligne était intense en raison d’un week-end prolongé. Des perquisitions avaient été menées dans la gare de Larissa. Selon une source judiciaire, l’enquête vise aussi « à engager des poursuites pénales, si nécessaire, contre des membres de la direction de l’entreprise » Hellenic Train, les chemins de fer grecs.

« Assassins » écrit en rouge sur la façade d’Hellenic Train

Les inhumations de victimes se sont par ailleurs poursuivies dimanche dans une immense émotion. À la petite gare de Rapsani, proche des lieux de l’accident dans le centre du pays, des parents d’élèves ont déposé des œillets rouges et blancs et allumé des bougies sur les rails.

La colère est avant tout dirigée contre Hellenic Train. Le mot « Assassins » a été peint en lettres rouges sur une vitre du siège à Athènes vendredi. L’entreprise est mise en cause pour de nombreuses négligences et lacunes ayant entraîné cette catastrophe qualifiée de « tragédie nationale » par les autorités.

Elle s’est défendue samedi soir, assurant avoir « été présente dès les premiers instants sur les lieux » et avoir mis en place « un centre d’appels (…) pour fournir des informations ». Hellenic Train a été acheté en 2017 par le groupe public italien Ferrovie Dello Stato Italiane (FS) dans le cadre du programme de privatisations exigé par les créanciers de la Grèce pendant la crise économique (2009-2018). Les représentants syndicaux des chemins de fer avaient tiré la sonnette d’alarme il y a trois semaines sur le risque d’accident.

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Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/catastrophe-ferroviaire-en-grece-la-colere-degenere-en-violences-le-chef-de-gare-en-detention-05-03-2023-VY3H2J5OQVDZXK7YAZTYAVA7G4.php