Bordeaux : « Nous avons été attaqués par une quarantaine de jeunes », témoignent des habitants du campement incendié

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Publié le 20/07/2021 22:15:43

L’incendie qui a éclaté dans le campement de fortune de Cracovie, au nord de Bordeaux, serait bien criminel. La thèse d’une expédition punitive, après un différend entre un habitant des Aubiers et un jeune Bulgare, est privilégiée. L’enquête a été confiée à la sûreté départementale

Il s’étend au sud de la cité des Aubiers, entre l’allée de Boutaut et la place de Latule, au nord de Bordeaux : le campement de fortune de Cracovie ressemble à un petit bidonville. Caravanes déglinguées, cabanons en bois de récupération, câbles électriques qui courent sur le sol à côté de flaques, voitures désossées… C’est là qu’un incendie, dont les fumées ont été vues par de nombreux Bordelais, a éclaté, dans la soirée de lundi 19 juillet.

On ne déplore pas de blessé, mais une quinzaine de caravanes et des carcasses de voitures ont brûlé. La thèse d’un acte criminel est privilégiée.

« D’après les premiers éléments qui doivent être vérifiés par l’enquête, un différend aurait éclaté, en dehors du camp, un peu plus tôt dans la journée, entre un père de famille, habitant des Aubiers, et un jeune Bulgare. Le second, qui ne serait pas un habitant du campement, s’y serait réfugié. Des jeunes des Aubiers s’y seraient ensuite rendus et des cocktails molotov auraient été jetés », indique le procureur de Bordeaux, Frédérique Porterie. Le parquet a requis un expert en incendie et confié l’enquête à la sûreté départementale.

« Traités comme des chiens »

Au lendemain des faits, des habitants du campement parlent d’une « attaque ». « Une quarantaine de jeunes a envahi le camp. Ils sont arrivés par les deux entrées. Ils ont mis le feu sur leur passage », assurent plusieurs hommes, devant les restes de voitures cramées. « C’est un désastre », soupire Traian, « un ami d’habitants ». « Beaucoup d’hommes et de femmes qui vivent ici, travaillent. Dans les vignes, surtout. Regardez autour de vous, ils sont traités comme des chiens. Les autorités ne font rien », s’emporte-t-il.

Selon la préfecture, le campement de Cracovie est né en février 2020. D’après le dernier recensement effectué par ses services, 180 personnes de nationalités bulgare et roumaine, dont une quarantaine d’enfants, y vivaient. Elles avoisinaient les 500, il y a quelques mois, d’après plusieurs sources.

« Des tensions réelles »

« Ce qui s’est passé lundi démontre l’urgence à fermer ce squat, estime Vincent Maurin, maire adjoint du quartier qui « en appelle à l’État ». « Cette situation ne peut pas durer. Les tensions entre les habitants des Aubiers et ceux du campement sont réelles. Elles ne sont pas dues à l’existence d’un squat à côté d’une cité populaire, mais à une partie des activités sur le campement où de nombreux feux sauvages sont allumés pour récupérer des métaux. Il y a aussi des vols de câbles dans le quartier, que les habitants des Aubiers imputent peut-être à tort au squat. Et puis, une mauvaise gestion des déchets avec une prolifération des rats dans les jardins familiaux. Malgré un lourd accompagnement, mobilisant la Ville, les associations, ça ne marche pas », souligne-t-il. Délégué syndical CGT à la Saft, usine classée Seveso qui jouxte le campement, Christophe Arquey ne dit pas le contraire. « Ça fait des mois qu’on alerte sur le risque incendie. Rien ne bouge », dénonce-t-il.

Une partie du terrain appartient à Bordeaux Métropole, l’autre au Grand port de Bordeaux. Les deux ont engagé des procédures d’expulsion, obtenu l’aval de la justice et demandé le concours de la force publique. « Les services de l’État travaillent sur le sujet. Avant d’accorder le concours de la force publique, il y a une phase de diagnostic. Il était en cours quand l’incendie a éclaté », explique la préfecture, sans préciser si la procédure va être accélérée. Si des habitants ont quitté le campement depuis lundi soir, certains souhaitent malgré tout y rester. « On est bien ici, lâche un homme devant son cabanon. Où voulez-vous qu’on aille ? On veut juste plus de sécurité. »

Crédits image et texte : Sud Ouest©
Source : https://www.sudouest.fr/gironde/bordeaux-nous-avons-ete-attaques-par-une-quarantaine-de-jeunes-temoignent-des-habitants-du-campement-incendie-4217427.php