

Publié le 05/08/2022 20:27:01
Le parquet antiterroriste a requis ce vendredi que sept personnes de l’entourage de Radouane Lakdim, tué à l’époque, soient jugées par la cour d’assises spéciale. La petite amie et le plus proche ami de l’assaillant comparaîtront pour «participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle».
Après quatre ans d’enquête, les juges d’instruction antiterroristes avaient annoncé en mars avoir terminé leurs investigations sur les attentats meurtriers de Trèbes et Carcassonne en 2018. Quatre personnes avaient été tuées dont le lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame, égorgé par l’assaillant. Le parquet antiterroriste a requis vendredi que sept personnes, de l’entourage de l’auteur - tué à l’époque - soient jugées par la cour d’assises spéciale.
Les faits remontent au matin du 23 mars 2018. Radouane Lakdim, 25 ans, vole une voiture à Carcassonne, dans l’Aude. Armé, il tue le passager de 61 ans et blesse le conducteur de 26 ans. Il tire ensuite sur un groupe de CRS (compagnies républicaines de sécurité) à proximité de leur caserne, blessant l’un d’eux, avant de rejoindre un supermarché Super U à Trèbes.
Se présentant comme un soldat du groupe Etat islamique et criant « Allahou akbar », il tue un boucher et un client. Il égorge ensuite le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame qui s’était livré à la place d’une otage, avant d’être lui-même tué sur place par le GIGN.
Dans ses réquisitions, signées vendredi et consultées par l’AFP, le parquet national antiterroriste (PNAT) considère que les attaques de Radouane Lakdim, délinquant de droit commun fiché en raison de sa radicalisation, « ont été inspirées par la propagande mortifère » et les « appels répétés au djihad global » des organisations djihadistes.
L’EI avait revendiqué ces attaques, une revendication jugée « opportuniste » par l’accusation : les investigations n’ont pas établi de contacts entre Radouane Lakdim et l’organisation, ni de complice ou de coauteur. Au terme de quatre ans d’investigations, le PNAT demande qu’une femme et six hommes, âgés de 24 à 33 ans et appartenant à l’entourage de l’auteur soient jugés par la Cour d’assises spéciale pour leur aide matérielle ou intellectuelle.
La compagne du tueur « ardente défenseur du djihad »
Le parquet antiterroriste requiert que la petite amie et le plus proche ami de l’assaillant, Marine P., 24 ans, et Samir M., 27 ans, comparaissent pour « participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle ». La jeune femme, « ardente défenseur du djihad », « partageait la même vision radicale de la religion que Radouane Lakdim » qu’elle fréquentait depuis plusieurs années. Pour l’accusation, elle savait qu’il projetait de passer à l’acte, ce qu’elle a contesté lors de sa garde à vue.
Samir M. était « le plus proche ami » de l’auteur. Ensemble, « ils traînaient » dans le quartier Ozanam de Carcassonne, faisaient du sport et du trafic de stupéfiants. « Pourtant éclairé sur la dangerosité de Radouane Lakdim », il l’a conduit dans une armurerie pour qu’il achète un poignard deux semaines avant les faits, souligne l’accusation.
Jugé pour avoir fourni des « arguments religieux »
Sofian B., 24 ans et déjà condamné quand il était mineur pour avoir projeté de se rendre en zone irako-syrienne en 2017, devra être jugé pour avoir fourni un soutien intellectuel à Radouane Lakdim, considère le PNAT.
Il avait échangé avec lui sur un forum de discussion acquis à l’idéologie djihadiste, notamment sur l’interprétation de publications religieuses. Pour le PNAT, le jeune homme « a œuvré au projet mortifère de l’assaillant » et lui a fourni « des arguments religieux justifiant un passage à l’acte meurtrier ».
Le beau-frère avait nettoyé l’appartement
Le parquet antiterroriste réclame que deux autres hommes soient jugés pour « non-dénonciation de crime terroriste ». L’un d’eux, beau-frère de l’auteur, est aussi accusé d’avoir nettoyé le domicile des Lakdim, emportant un sac volumineux avec lui avant une perquisition des policiers.
« En matière de terrorisme, la justice déraisonne car il est incompréhensible que mon client soit renvoyé devant une cour d’assises et qu’il soit encore détenu », a réagi auprès de l’AFP son avocate, Me Emmanuelle Franck. « Nous ne savons toujours pas ce qui lui est matériellement reproché à part le fait d’être le beau-frère de Lakdim », a-t-elle ajouté.
Deux autres hommes sont sous la menace d’un procès, notamment pour détention d’armes. Le parquet sollicite en revanche un non-lieu pour un informateur des renseignements, soupçonné d’avoir fourni des armes à l’assaillant.
Les investigations ont révélé qu’il avait signalé la radicalisation de Radouane Lakdim en 2014, puis son « intensification ». Une note de janvier 2018 « ne mentionne pourtant aucun élément d’inquiétude et conclut à la mise en sommeil de son suivi », relève le PNAT. Il revient désormais aux juges d’instruction d’ordonner ou non un procès aux assises en suivant ou non les qualifications du parquet antiterroriste.
Les autres avocats contactés par l’AFP n’ont pas répondu ou n’ont pas souhaité réagir.
Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/attentats-de-trebes-et-carcassonne-en-2018-proces-requis-pour-la-petite-amie-de-lassaillant-et-six-hommes-05-08-2022-B2IFP644EJDRBGSU2KRR624WNE.php