«L’Île-de-France arrive en tête des signalements de violences sexuelles et sexistes»

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Publié le 05/10/2021 06:00:00

C’est le constat du commandant Sandrine Masson, qui dirige le portail national de signalement des violences et sexistes basé à Guyancourt (Yvelines). L’officier nous explique comment fonctionne cet outil qui permet aux victimes de libérer leur parole et doit faciliter le dépôt de plainte.

La commandante Sandrine Masson dirige le portail national de signalement des violences sexuelles et sexistes de Guyancourt (Yvelines). Disponible 24 heures sur 24, cette plate-forme qui a vu le jour en novembre 2018, permet aux victimes de signaler les faits. Avec 2 294 chats, sur 7 129 réalisés dans toute la France entre le 1er janvier et le 31 juillet 2021, l’Île-de-France arrive en tête des signalements. Sur ce triste podium Paris intra-muros se hisse sur la plus haute marche, suivi des Hauts-de-Seine puis de la Seine-Saint-Denis. Cette policière d’expérience nous révèle comment fonctionne cet outil.

Comment fonctionne cette plateforme de signalement ?

Sandrine Masson. Concrètement, c’est une plateforme exclusivement accessible sur Internet. Trente opérateurs y travaillent sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Il s’agit de signalement concernant les violences sexuelles, sexistes et conjugales. Toutes victimes, témoins ou proches de victimes peuvent nous signaler ces faits par « chat ». La conversation instantanée peut rester anonyme. La seule obligation consiste à entrer un code postal. Cela permet d’être dirigé soit vers la brigade numérique de Rennes (Ille-et-Vilaine) pour ce qui concerne la zone gendarmerie ou ici à Guyancourt pour la zone police. 32 personnes travaillent dans ce bâtiment des Yvelines. En moyenne chaque chat dure 55 minutes. Mais ils peuvent être très courts ou durer jusqu’à deux heures trente. Les opératrices ne prennent qu’un chat à la fois pour rester concentrée.

Quelles suites donnez-vous à ces signalements par Internet ?

Si l’internaute souhaite déposer plainte, nous prenons ses coordonnées et nous envoyons son chat auprès du commissariat compétant pour son domicile. La personne bénéficie alors d’un rendez-vous avec un fonctionnaire de police qui la reçoit et prend son audition. Son dépôt de plainte est facilité, car elle n’a qu’à dire qu’elle a rendez-vous avec tel enquêteur sans répéter à plusieurs personnes et devant des inconnus qu’elle vient de se faire violer. Si la personne ne souhaite pas déposer plainte, nous échangeons avec elle, car notre but est aussi de libérer la parole. Même si elle ne souhaite pas nous donner ses coordonnées, nous l’orientons vers des associations ou les pôles psychosociaux du commissariat. Nous savons pertinemment que ces personnes reviendront plusieurs fois, le temps que leur esprit chemine et qu’elle décide de mettre fin à leur histoire de couple et de violence. 69 % de chats restent anonymes et 31 % se transforment en plaintes. Dans la moitié des cas, il s’agit de faits concernant les mineurs.

Y a-t-il des cas où vous décidez quand même d’ouvrir des investigations ?

Lorsqu’une enfant est abusée par son beau-père la plateforme se doit de donner l’alerte pour protéger les victimes. De même, lorsqu’il s’agit de violences conjugales graves et réitérées, quand une femme assure qu’elle vient de se faire frapper durant la nuit et que cela recommence tous les soirs. Dans ces deux situations, nous nous passons de l’accord de la personne. L’adresse IP est identifiée et une enquête est ouverte par les services de police compétents. En revanche, si le chat porte sur des faits de viol qui sont vieux de dix ans et que la personne n’est plus immédiatement en danger, nous archivons la conversation. Nous laissons la victime prendre son temps et déposer une plainte quand elle le souhaite.

Quels sont les projets d’avenir de la plateforme de Guyancourt ?

Pour l’avenir, le projet est d’ouvrir la plateforme aux infractions liées aux discriminations et au cyberharcèlement notamment vis-à-vis des mineurs, pour les raids numériques sur les réseaux sociaux. Nous pourrons recueillir des signalements de victime de discrimination liée à l’âge, au physique, à l’origine géographique, ethnique ou à l’orientation sexuelle. Le projet devait voir le jour fin 2020 mais il a pris un peu de retard, Tout est prêt. Nous attendons la publication des décrets.

Pour accéder au portail sur Internet : https://www.service-public.fr/cmi

Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/lile-de-france-arrive-en-tete-des-signalements-de-violences-sexuelles-et-sexistes-05-10-2021-UYIWMWYWNBFITAP4PMBTAR7YBY.php