«Cold cases» : 5 minutes pour comprendre comment va opérer le nouveau pôle d’enquête créé par Dupond-Moretti

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Publié le 13/01/2022 16:16:35

Le ministre de la Justice a annoncé mercredi le lancement en mars prochain d’un pôle judiciaire dédié aux crimes non résolus. Une avancée majeure censée reprendre 240 dossiers bloqués dans les tribunaux.

Durant l’enquête sur l’affaire du « Grêlé », c’est grâce à l’acharnement de la juge d’instruction et des enquêteurs, qui ont effectué des prélèvements ADN d’une centaine de gendarmes, que la justice est parvenue à identifier le tueur recherché depuis plus de trente ans. La création d’un pôle judiciaire dédié à la résolution d’affaires non élucidées, le 1er mars à Nanterre, annoncée mercredi par le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti vise à répéter ce genre de traque. Trois juges d’instruction, un premier vice-président et deux vice-présidents, « détachés à 100 % », auront la lourde tâche de dépoussiérer des dossiers perdus dans les limbes des tribunaux et résoudre les « cold cases » françaises.

Les affaires concernées

Pas moins de 240 affaires en cours, seraient concernées par ce pôle. « Sur le fond, nous ne pouvons pas communiquer la liste des dossiers qui sont identifiés comme susceptibles d’être transmis au pôle », prévient toutefois le ministère de la Justice auprès du Parisien. Si les « cold case » emblématiques telles que l’affaire Grégory ou celle de la disparition de la petite Maëlys nous viennent immédiatement à l’esprit, cette nouvelle cellule devrait avant tout bénéficier aux cas les plus méconnus qui sont les plus susceptibles de « mourir judiciairement ».

« Les plus grandes victimes de ce système actuel sont les centaines de crimes méconnus, qui ne sont pas maintenus en vie par la médiatisation et qui se perdent jusqu’à devenir des dossiers comateux », confirme au Parisien Alain Bauer, professeur en criminologie au Conservatoire national des arts et métiers et qui anime l’émission « Au bout de l’enquête » sur France 2.



En mars dernier, la parution d’un rapport mené par un groupe de travail dirigé par Jacques Dallest, procureur général de Grenoble, appelait déjà à la création d’un « bureau des enquêtes criminelles cold cases » chargé de créer « une véritable mémoire criminelle ».

« Il y a des dossiers qui depuis 30 ans n’ont pas été traités comme il le fallait, pour lesquels les juges ne font rien. Or si on ne cherche pas la vérité on ne la trouvera jamais », a confirmé Me Corinne Hermann sur BFMTV après l’annonce d’Eric Dupond Moretti. Avocate notamment des parents d’Isabelle Mesnage, tuée en 1986 par Jacques Rançon, c’est elle qui avait indiqué aux enquêteurs que la jeune femme avait subi les mêmes mutilations que les deux autres victimes perpignanaises du tueur alors que l’enquête piétinait.

Comment fonctionnera-t-il ?

L’arrivée de cette juridiction spécialisée ne devrait pas dans un premier temps bouleverser le système en place où « 95 % du judiciaire est traité par des services locaux », d’après Alain Bauer. « Ce pôle n’aura pas de compétence exclusive comme le Parquet national antiterroriste », explique-t-on place Vendôme. La prise en charge d’une affaire se fera sur demande du juge d’instruction actuellement sur le dossier pour « ne pas nuire à la sérénité des investigations ». « Une cosaisine avec les enquêteurs initiaux et les services spécialisés est aussi tout à fait possible », assurait mercredi le ministre de la Justice.

VIDEO. Monique Olivier, épouse et complice diabolique du tueur en série Michel Fourniret

Au-delà d’une meilleure organisation à l’échelle nationale ce pôle devrait également permettre une meilleure collaboration avec les services étrangers dans le cas des crimes sériels et des tueurs itinérants. « La création d’un pôle plus sensible, plus formé à ces questions peut permettre d’avoir plus facilement des contacts avec les équivalents européens, si jamais on devait soupçonner que la personne ait pu passer à l’étranger et commettre d’autres faits », estimait Jean-Baptiste Perrier, directeur de l’Institut des sciences pénales et de criminologie, dans une interview à France culture en mai dernier.

Déjà une division « cold cases » à la gendarmerie

« Les magistrats instructeurs de ce nouveau pôle auront toute la liberté de poursuivre avec les enquêteurs initiaux ou de saisir un service spécialisé dans les crimes non élucidés, comme la division Diane à Pontoise », a précisé Éric Dupond-Moretti. Cette cellule de la gendarmerie spécialisée dans la résolution de crimes non élucidés est une version « policière » de ce nouveau pôle judiciaire qui devrait donc travailler en collaboration étroite avec elle.

C’est d’ailleurs sur ce modèle que s’est bâti le nouveau pôle judiciaire. Inaugurée en octobre 2020, la division Diane (pour Division des Affaires Non Élucidées) réunie dans une équipe toutes les compétences nécessaires à la résolution de dossiers complexes « vieux de 2 heures à 30 ans ». « Nous avons des enquêteurs spécialisés en détection de la sérialité, en science du comportement ou du parcours de vie du criminel », explique le lieutenant Marie-Laure Brunel Dupin, chef de la division.

« Nous attendions la création de ce pôle judiciaire avec impatience et nous sommes ravis de pouvoir désormais travailler avec ce partenaire de premier choix », se réjouit le lieutenant-colonel Brunel-Dupin. La cellule Diane a notamment permis de résoudre, à l’été 2020, un crime commis il y a près de 20 ans : celui du meurtre de Chantal Chillou de Saint Albert, retrouvée morte dans la Drôme en 2001.

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Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/cold-cases-5-minutes-pour-comprendre-comment-va-operer-le-nouveau-pole-denquete-cree-par-dupond-moretti-13-01-2022-TFFXVCXTXZBNJEB3J4BPINDFJM.php