« Casser, c’est toujours nous qui allons le payer » : regain de violences dans les défilés du 1er Mai

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Publié le 01/05/2023 20:21:08

De sérieux incidents ont éclaté dès le début du cortège ce lundi à Paris où un policier a été gravement brûlé. Des heurts tranchant avec les manifestants pacifiques et résolus, venu massivement dire non à la réforme des retraites.

Un policier en tenue de maintien de l’ordre s’effondre sur le dos, boulevard Voltaire à Paris, entre un porche d’immeuble et un barbier salon de coiffure. Un brasier lui dévore le ventre. Des collègues se précipitent sur lui et le blanchissent de neige carbonique, tandis que d’autres les protègent des projectiles tirés presque à bout portant. Obligés de charger sans ménagement le groupe hostile agglutiné sur le même trottoir.

Les flammes sont étouffées en moins de dix secondes, sans doute les plus longues de sa vie pour ce membre d’une compagnie d’intervention que ses camarades aident à se relever avant son exfiltration. Il sera hospitalisé, brûlé au 2e degré au niveau du visage, du bas-ventre et des poignets. La scène choquante de ce policier atteint par un engin incendiaire restera comme le pic des violences qui n’ont cessé d’émailler la manifestation de ce lundi 1er mai dans la capitale.

VIDÉO. Manif du 1er Mai à Paris : un policier touché par un cocktail Molotov

Le rassemblement parisien de plus d’un demi-million de personnes, selon la CGT (112 000, d’après l’Intérieur), patiente ce lundi à 14 heures. Salué par la foule, un coup de tonnerre déchire le ciel parisien. Tandis que des trombes d’eau s’abattent, les sons assourdissants de fusées de feux d’artifice et d’engins incendiaires, déjà, retentissent. Massé place de la République, le cortège officiel du 1er Mai, placé sous le signe de la contestation de la réforme des retraites, s’ébranle à peine — il se scindera plus tard en deux — lorsque débutent les premiers affrontements entre forces de l’ordre et black blocs. En amont de la tête du défilé, durant près de quatre heures, tout au long du boulevard Voltaire et jusqu’à la place de la Nation, souffle un vent de violences, de jets de projectiles et de lacrymogènes.

Premières charges, premiers heurts

Dans la sorte de « no man’s land » qui se crée entre le premier cordon de gendarmes mobiles, qui très vite s’éloigne, et le gros du rassemblement, plusieurs centaines de manifestants vêtus de noirs, visages dissimulés, s’en prennent aux vitrines de banques et de commerces ou aux pourtours de verre de kiosques à journaux et des abris bus.

« Vive le vent, vive le vent, vive le vandalisme », tague à la bombe rose un gars encapuchonné. « Macron démission », s’applique à tracer un autre en rouge sur une façade tandis que le slogan anti-police « ACAB » (« tous les flics sont des bâtards ») jaillit sur des murs.

Premières charges, premiers heurts. Aux projectiles en tous genres répondent jets de lacrymo et de grenades défensives. Place Voltaire, une grappe de silhouettes en noir parvient à défoncer l’entrée du McDo, pourtant barricadée, avant de s’éparpiller. Un vendeur de brins de muguets replie précipitamment son étal. Un homme hurle dans son mégaphone : « Pour tous les manifestants, – 20 % chez McDo ! Sur présentation de votre carte de manifestant bien sûr ! ».

« Casser, c’est toujours nous qui allons le payer. Seul le négatif reste »

Robert et Martine, 70 ans, autocollants LFI sur la poitrine, ont tenté de dissuader les casseurs : « Impossible. Ces jeunes sont fous furieux. Et le cortège n’avance pas ! », pestent-ils.

Appuyé sur son vélo, lunettes constellées de gouttes de pluie, Jean-Michel, 66 ans, observe avec prudence le ballet des black blocks. « Manifester, c’est inscrit dans la Constitution. Casser, c’est toujours nous qui allons le payer. Seul le négatif reste », regrette cet ancien fonctionnaire à la Poste, dont la présence est motivée « par la crise sociale et la crise économique ».

Soudain, ça charge et ça court. Yeux rougis, on s’arrête à l’angle de rue suivant, où un autre barrage d’uniformes clôt le passage. « C’est chaud ! C’est chaud ! », crie un homme hilare dans son téléphone.

La tension monte à Nation

La situation se fige. Sous les huées, les charges redoublent. Un cordon de gendarmes extrait à toute vitesse un homme interpellé. Deux engins lanceurs d’eau entrent en action avant de reculer. Un vieil homme peste : « C’est la pagaille, moi, je m’en vais. »

Thomas, 25 ans, en recherche d’emploi, tenait à manifester ce 1er mai, « car c’est un rassemblement international et que les problèmes sociaux sont partout dans le monde ». Il jette un œil vers le ciel : « Les drones, je ne les ai pas vus. Si c’est encore un outil pour réprimer… »

Peu à peu, les silhouettes en noir cèdent la place aux troupes du défilé. Peu avant 18 heures, la tension monte de nouveau d’un cran à Nation, avec un début d’incendie allumé entre une pharmacie et un café. Les flammes, léchant dangereusement une façade d’immeuble, sont éteintes grâce au canon à eau des policiers.

VIDÉO. Manif du 1er Mai : violent incendie à Paris, un camion de police sort ses canons à eau

Ces scènes de violences, qualifiées « d’inacceptables » par Élisabeth Borne, ne sont pas limitées à Paris. Elles ont éclaté plus tôt dans la journée, pendant ou en marge des défilés à Lyon, Nantes ou Angers, notamment. Dans la capitale des Gaules, où on déplore de nombreuses dégradations, l’utilisation d’un drone a permis d’interpeller les auteurs présumés d’une intrusion dans une mairie, et d’une vingtaine de personnes qui avaient pénétré dans un commerce. À Nantes, les affrontements ont duré une bonne partie de l’après-midi, avec environ 800 black blocs, « nombre jamais vu » de source policière. Ces incidents ont fait cinq blessés, dont un gendarme et un manifestant, gravement touché à une main.

Selon les chiffres donnés par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, ce lundi soir, au moins 108 policiers et gendarmes ont été blessés, dont une vingtaine à Paris. Il y a eu 291 personnes, interpellées, dont 90 dans la capitale où la place de la Nation restait sous tension après 20 heures.

Crédits image et texte : Le Parisien©
Source : https://www.leparisien.fr/faits-divers/defiles-du-1er-mai-un-regain-de-violences-a-paris-et-dans-plusieurs-villes-01-05-2023-OEO2VJPQXJC4LEQ4GSGUAUHEJY.php